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Le numérique va-t-il permettre de co-créer et co-financer des campagnes de com publique ?

Publié le : 3 mai 2019 à 11:18
Dernière mise à jour : 6 mai 2019 à 16:20
Par Bernard Deljarrie

Rendre utilisable par d’autres sa campagne de communication, la créer et la financer à plusieurs. Le lancement d’une plateforme de partage pour les campagnes d’intérêt général ouvre de nouvelles possibilités. Même si les avantages semblent évidents, les spécificités de chaque territoire et les difficultés de la mise en commun ont toujours limité ces mutualisations.

L’action de communication visait les agents de la collectivité et les interpellait de manière humoristique au moyen d’animaux sympathiques. Lauréate du Grand Prix Cap’Com 2013 dans la catégorie « communication interne », cette campagne créée par Metz Métropole aurait pu faire des adeptes. Dominique Bodet, directrice de la communication de la communauté de communes du Pays de Lunel, le reconnaît. Elle l’aurait bien déclinée dans sa collectivité.

Peu de temps après, une petite centaine de communicants se penchent fort opportunément sur le sujet lors d'un atelier du Forum Cap'Com de décembre 2014 à Nancy, atelier intitulé « Comment mutualiser ses achats de communication ? ». Un atelier qui révèle l'enthousiasme des communicants à l’idée de mutualiser les outils de communication entre collectivités. En effet, en cette période de restrictions budgétaires, le partage de campagnes de communication publique rencontre un vent favorable.

Proposer aux autres collectivités une campagne toute faite

Le phénomène n’est pas entièrement nouveau. De nombreux organismes publics ont développé le principe en permettant aux collectivités locales d’utiliser leur campagne. Prenons des exemples. Depuis plusieurs années, l’Agence pour la nature et la biodiversité en Île-de-France met à disposition des outils éditoriaux pour les collectivités sur le thème de la biodiversité (comme le cahier découverte nature pour les CM2), avec l’idée de diffuser les bonnes pratiques au plus grand nombre.

Autre exemple récent, en prévision des élections européennes, la Représentation en France de la Commission européenne, en partenariat avec l’AMF, présente un kit de communication à destination des communes. Un ensemble d’instruments de communication, qu’ils soient électroniques ou sous forme de brochures d’information, disponibles en téléchargement.

Citons aussi la campagne menée par Cap’Com pour assurer une bonne communication en direction du public mal inscrit sur les listes électorales. Le réseau rend disponibles un argumentaire, des exemples de visuels, une bibliothèque d’illustrations et d’accroches utilisables par les communes, et un exemple d’article de presse.

C’est avec ce même esprit de mutualisation que la communauté de communes du Pays de Lunel avait mis à la disposition des communicants publics sa campagne « Agents très spéciaux ». Lancée en septembre 2014 dans le cadre de son programme de prévention des déchets et de son Agenda 21, cette action sur l’éco-exemplarité fut mise en open source. La communauté de communes du Pays de Lunel et son agence Patte Blanche mettent alors les fichiers de la campagne à la disposition de qui veut s’en inspirer : affichette, fiches, autocollants, badge, modèle de mug, kakemono… ; les collectivités intéressées peuvent alors télécharger ces supports.

Concevoir à plusieurs une même campagne

Sur le même registre, des campagnes sont parfois mutualisées par plusieurs collectivités locales. Prenons l’exemple de la campagne de communication commune lancée par les principales collectivités des Côtes-d’Armor en vue de la mise en service de la nouvelle ligne à grande vitesse entre Le Mans et Rennes au printemps 2017. Saint-Brieuc Agglomération, Lannion Trégor Communauté, Guingamp Communauté, Lamballe Communauté, CAD 22, la CCI des Côtes-d’Armor et le conseil départemental des Côtes-d’Armor financent conjointement cette opération, chacun apportant au pot commun une part en fonction de sa taille.

S’unir pour développer à plusieurs une campagne de communication publique, les cinq départements de Normandie l’ont aussi fait en décembre 2017. Le Calvados, l’Eure, la Manche, l’Orne et la Seine-Maritime ont affiché un même message : « Les départements normands agissent pour vous, la preuve par 5 ! » sur cinq visuels d’une campagne interdépartementale de proximité.

Mais Bretons et Normands le reconnaissent, il peut être difficile de mettre tout le monde d’accord sur la stratégie, le concept, l’ampleur et le calendrier de la campagne.

Une plateforme web pour partager ses campagnes de communication

C’est avec cette idée de mutualisation mais avec l’ambition de s’adresser à tous les organismes publics que vient de se lancer une plateforme web inédite qui doit permettre de créer, partager et/ou recycler des campagnes de communication d’intérêt général de collectivités, d’associations et d’institutions.

Installée en septembre 2018 à Montpellier, la plateforme Konenga est portée par Patte Blanche, l’agence qui avait partagé la campagne du Pays de Lunel. En pratique, la plateforme offre trois possibilités aux communicants publics : co-créer et co-financer à plusieurs une nouvelle campagne, personnaliser et réutiliser à moindre coût une campagne déjà en ligne sur la plateforme web, ou recycler leurs propres outils de communication. Dans ce dernier cas, les collectivités « donatrices » sont rétribuées par la start-up Konenga à chaque réutilisation de la campagne par une autre collectivité. Une seule condition, que la campagne serve l’intérêt général, par exemple sur des thèmes de protection de l’environnement, alimentation, réfugiés, diversité, discrimination, handicap, égalité, santé…

« Nous allons faire entrer la communication d’intérêt général dans l’ère de l’économie du partage pour lutter contre le gaspillage de création artistique et intellectuelle, et maximiser les impacts positifs du secteur de la communication », expliquent les fondateurs de Konenga. Une intention louable qui repose autant sur l’idée de rationaliser les budgets de communication que d’améliorer la diffusion et l’impact de leurs campagnes de communication d’intérêt général.