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Penser usager pour adapter son site

Publié le : 25 avril 2017 à 09:31
Dernière mise à jour : 22 mars 2018 à 09:56
Par Franck Confino, Benjamin Teitgen

Les sites internet publics doivent répondre aux attentes des citoyens. C’est un enjeu d’égalité d’accès au service public qu’a récemment pointé la Cour des comptes. Mais beaucoup sont encore calqués sur les organigrammes des collectivités et des administrations. La nouvelle génération de sites devra prendre en compte ce nouvel impératif : penser « User centric »

Placer l’usager au centre de la conception et de l’animation du dispositif web. L’affaire n’est pas si simple. Elle suppose d’investir du temps, des moyens et de nouvelles méthodes. Une révolution culturelle qui mettra du temps à se déployer mais dont les implications sont considérables. Dans leur ouvrage « Maîtriser sa communication publique numérique » (Territorial Éditions, 2017) Franck Confino et Benjamin Teitgen, experts numériques du réseau Cap’Com, précisent ce que signifie l’approche « User centric ». Éclairage

Un site « *user centric* » c'est quoi ?

C’est désormais au site de la collectivité de graviter autour du citoyen, ou de s’adapter aux écrans (qu’ils soient d’ordinateur, de tablette, de smartphone ou de télévision) et non l’inverse. C’est encore à lui de s’adapter aux desiderata des multiples profils d’utilisateurs, au lieu de vouloir imposer sa vision du besoin. Sinon il ne sera qu’une vitrine figée et vieillie… d’un magasin déserté. À lui de remplir son rôle de «* guichet unique* » en permettant à l’utilisateur d’accéder à tous les services qui l’intéressent, de l’inscription jusqu’au paiement en ligne en retrouvant toutes ses informations dans son compte personnel, accessible via ses identifiants France Connect.

Penser usager

Cette bascule porte un nom, « user centric » (tourné autour de l’usager), et répond à des principes intangibles que l’on peut résumer en quelques mots-clés : simplifier, personnaliser, écouter, partager…, bref, « penser usager ».

« Penser usager », ça veut dire justement qu’on met l’usager, l’internaute, à sa vraie place : au centre. Le sujet, c’est lui. L’enjeu, c’est lui. Le site doit répondre prioritairement à ses besoins, à ses attentes, et non pas aux besoins de la collectivité en matière de visibilité, de promotion, etc.

Dans cette dynamique, le site Internet de la collectivité doit donc aujourd’hui avant tout proposer un bouquet de services, des renseignements pratiques, une information riche et interactive, des espaces d’expression politique et citoyenne, des procédures administratives simplifiées et même favoriser le lien social ou les échanges, comme la mise en relation avec d’autres internautes (petites annonces, échanges de services, rencontres, etc.) au sein de la collectivité.

Cela peut sembler évident, mais cela correspond le plus souvent à une petite révolution intellectuelle, puisqu’on passe de sites dont le message sous-jacent est souvent « je suis la collectivité de xxx, voici ce que je fais » (avec au passage une arborescence calquée sur l’organigramme de la collectivité, donc relativement obscure pour l’usager), à des sites qui se positionnent autour d’un message « vous habitez sur ce territoire, de quoi avez-vous besoin ? »

Des sites « *user centric* » ouverts et serviciels

L’un des principaux enjeux d’un site Internet de collectivité locale aujourd’hui est de passer d’un site vitrine à un site plaçant l’utilisateur au centre – « user centric » – et lui permettant d’accéder simplement à un maximum de services en ligne.

Beaucoup de collectivités en sont loin, nous direz-vous ? La Cour des comptes, qui a rendu public un rapport alarmant sur l’organisation territoriale de l’État, le pense également… Elle invitait dans ce rapport les pouvoirs publics à faire évoluer en profondeur l’organisation de l’État sur le territoire afin de répondre aux évolutions économiques et sociales. Concernant les sites web, le constat était sans appel : la Cour épinglait de nombreuses administrations en soulignant les insuffisances de leur dispositif digital. Que leur reprochait-elle en 2013 ? L’essentiel de ce qu’on retrouverait, hélas, en 2017, si l’on auditait les sites Internet des 40 000 collectivités locales françaises…

**Pas assez « user centric » ! **C’est le premier reproche que fait la Cour des comptes au web public : les sites Internet des administrations françaises sont d’abord faits pour elles, et non pour l’usager. « La consultation des sites Internet de nombreuses administrations suffit à démontrer que ce type de service demeure mal développé (…) conçu pour les besoins propres des administrations, et non pour les usagers. »

Pas assez informatifs ! La Cour des comptes pointe ensuite les difficultés d’accès à l’information pour l’utilisateur, le manque d’hyperliens qui enferment le citoyen sans lui indiquer des chemins extérieurs…

Pas assez dématérialisés ! Non, « service dématérialisé » ne veut pas dire « documents à imprimer chez soi et à déposer en mairie »…, comme semblent le penser encore certains. Il existe même des e-services qui frôlent le green-washing et ne simplifient rien, ce que pointe la Cour des comptes : « Le support papier demeure très utilisé. De nombreux usagers continuent à se rendre dans les locaux de l’administration pour obtenir des renseignements ou des pièces administratives ou traiter leurs dossiers. »

Pas assez immergés dans les réseaux sociaux ! C’est également irrévocable : le rapport de la Cour des comptes souligne que « les réseaux sociaux, vecteurs d’interactivité avec l’usager, ne sont que très rarement utilisés ». Elle recommande ainsi de « développer toutes les formes de communication numérique comme nouveau moyen de proximité et de simplification des échanges »… Espérons que l’ouvrage(*) que vous avez entre les mains vous donnera au moins envie de faire progresser votre collectivité sur ce point !

Trop compliqués, pas assez interopérables ! Dans le but d’accélérer le développement homogène des systèmes d’information et de renforcer l’e-administration, la Cour recommande de « donner au secrétariat général du gouvernement (DISIC) les moyens d’exercer son rôle de pilotage en matière de systèmes d’information, visant à favoriser leur interopérabilité ; et substituer aux démarches multiservices le système des plates-formes Internet, partagées ou partenariales, pour améliorer et simplifier les services aux usagers ».

Et la Cour des comptes de conclure que le digital devrait être en amont de toute réflexion globale : « Toute réflexion sur l’implantation des services administratifs devrait désormais prendre en compte le développement potentiel des techniques numériques. » Une « révolution » qu’il serait peut-être temps d’engager, plus de trois ans après ces préconisations ?

Maîtriser sa communication publique numérique - Enjeux, outils et stratégie

Franck Confino, consultant en communication digitale, formateur au sein du réseau Cap’Com.

Benjamin Teitgen, responsable information communication, Rennes ville et métropole, animateur des Carrefours numériques du Forum Cap’Com Territorial Edition/ en partenariat avec Cap’Com / Dossier d’experts / Janvier 2017 Commandez l'ouvrage auprès de Territorial Éditions : version papier : 65 €, version numérique (pdf) : 55 €.

Couverture de l'ouvrage Maîtriser sa communication publique numérique