Migrations : un dialogue ville à ville en Méditerranée
Aujourd’hui, parler de migration, c’est agiter un épouvantail. Pourtant c’est aussi une réalité, vécue, à l’échelle des villes. Pour présenter des initiatives de communication locales innovantes qui façonnent et équilibrent le récit des migrations, le projet MC2CM a organisé les laboratoires de communicants urbains dans le cadre de la conférence euro-méditerranéenne EMNC.
Les objectifs de la conférence de Paris (2 et 3 novembre 2021) étaient de renforcer le rôle des acteurs locaux comme promoteurs de récits objectifs, représentatifs et facilitateurs de dialogue en :
- donnant sa place à la dimension locale sur ces thématiques ;
- présentant des actions de communication concrètes et innovantes ;
- et en favorisant l’apprentissage entre pairs (avec notamment la mise en place d’un atelier laboratoire sur une demi-journée).
Les travaux furent ouverts par Mustapha Elouizi, journaliste et formateur en communication, qui a évoqué la narrativité, ossature du récit médiatique, « cette mise en reconstruction des faits ». Pour lui, « c’est un cœur qui voit, par rapport à une chose aussi humaine que le fait migratoire. Toute l’histoire de l’humanité est faite de récits de migrations. Tous les prophètes ont des récits migratoires » et il cita à ce sujet Roland Barthes ; avant de conclure en posant deux questions : comment éviter les pièges de l’information spectacle ? Comment éviter les discours victimaires ?
Invité lors de la séance introductive, Cap’Com a pris sa part à ce rendez-vous international en s’appuyant sur le sauvetage par la ville de Montpellier du maire afghan de Ghazni et de sa famille.
Parmi les intervenants qui enchaînèrent, Marta Perez Ramirez, coordinatrice de projet au Réseau espagnol des cités interculturelles (RECI) – Programme des cités interculturelles (ICC-CoE) Antirumours, a défini une intéressante stratégie antirumeur portée par des villes espagnoles et aujourd’hui adoptée par 45 villes en Europe. Elle détailla également la boîte à outils qui l’accompagne. Lamine Abbad, chef de projet à l’ICMPD, ajouta alors : « Aller se faire entendre par un gouvernement quand on est une petite ville, c’est difficile, mais lorsque l’on est en réseau, c’est plus facile. » Un point qui a été repris symétriquement, plaçant les villes en tête de pont en ce qui concerne l’ancrage des communications publiques dans le pragmatisme et dans les preuves (qui révèlent localement toute la complexité de la mobilité humaine) : « Le gouvernement a la responsabilité de communiquer sur les faits et les besoins, de la façon la plus objective possible », déclara Erik Den Hoedt, directeur des opérations au ministère des Affaires générales des Pays-Bas et vice-président du Club de Venise.
À noter, entre autres, l’intervention de Magali Fricaudet, responsable du service international « Via le Monde » au conseil départemental de la Seine-Saint-Denis : « On se rend compte que beaucoup de jeunes n’ont pas le récit de la migration des parents. C’est dur de raconter l’exil !
Des tensions très fortes se font jour dans notre territoire entre ceux qui arrivent et ceux qui sont arrivés il y a peu. L’hospitalité, c’est aussi une question d’accès au droit. » Une visite de terrain fut ensuite conduite par elle, dans son territoire, où elle a pu présenter aux participants à cette conférence des acteurs locaux impliqués dans les processus d’accueil, de socialisation, de dialogue et d’animation culturelle.
Qu’est-ce que MC2CM ?
Partant du principe que la migration est une caractéristique déterminante de l’urbanisation (hébergement, interactions), le projet Migration de ville à ville en Méditerranée (MC2CM) contribue à une meilleure gouvernance de la migration fondée sur les droits dans les villes. Par le dialogue, la connaissance et l’action, MC2CM ancre la gouvernance de la migration dans un processus de planification urbaine, en promouvant un discours réaliste et juste sur la migration. Développé dans le cadre du Dialogue sur les migrations de transit en Méditerranée (MTM), MC2CM est ancré dans un réseau de villes euro-méditerranéennes. Il est financé par l’Union européenne et cofinancé par l’Agence suisse de développement et de coopération et est mis en œuvre par le Centre international pour le développement des politiques migratoires (ICMPD), Cités et gouvernements locaux unis (CGLU) et le Programme des Nations unies pour les établissements humains (ONU-Habitat).