Comment évaluer le prix et le conseil dans un marché public de communication
L’objectif est de choisir l’offre « économiquement la plus avantageuse » lors de l’analyse des candidatures d’un marché public de communication. Mais comment ne pas surévaluer le critère prix pour choisir le « mieux-disant » et non pas le « moins-disant » ?
Les lignes de conduite des marchés publics de communication, adoptées par les organisations professionnelles de La Filière communication (1), donnent un certain nombre de conseils pour conduire des consultations plus responsables et attractives.
L’une des difficultés relevées par les responsables communication du secteur public est de faire apprécier à sa juste valeur la partie conseil de la réponse à un appel d’offres. Car, pour le responsable communication de la collectivité, la qualité de l’agence, sa capacité à accompagner la démarche, ses compétences techniques, ses conseils stratégiques sont bien plus importants que le prix. Une action de communication peu performante s’avère être bien plus dispendieuse.
Souvent, la répartition de la note se construit avec une pondération de 30 ou 40 % pour le prix, et de 70 ou 60 % pour le conseil. Cela laisse croire que le conseil est mieux considéré que le prix. Mais pourtant cela amène à une importante surévaluation du critère prix dans la note finale. Pourquoi ? Parce que le candidat proposant le prix le plus bas reçoit souvent la note maximale pour ce critère prix, tandis que la meilleure valeur conseil d’une réponse ne reçoit jamais cette note.
Imaginons une pondération de 40 % pour le prix, et de 60 % pour le conseil. La note 10/10 est donnée au meilleur prix et la note 8/10 est donnée au meilleur conseil. La meilleure note finale sera donc 10 x 40 % + 8 x 60 % soit 8,8 (4 + 4,8) dans laquelle la note de conseil ne pèsera que pour 54 % (4,8/10) et non pas 60 %.
Une solution simple, conforme à la jurisprudence, permet de conserver le poids relatif des critères. Il suffit, après que chaque offre a été notée individuellement, de porter systématiquement et pour chaque critère la meilleure note à la note de 10, les notes suivantes étant calculées par une règle de trois en référence à la meilleure note. Ainsi, le poids relatif de chaque critère est respecté.
Prenons un exemple, à titre d’illustration, conforme au guide et recommandations sur la formation et la variation des prix dans les marchés publics du ministère de l’Économie (2).
Exemple candidats A et B
La pondération choisie par l’acheteur est de 40 points pour le prix, et 60 points pour le conseil. Le conseil est évalué à partir de deux sous-critères, l’un pour la recommandation valant 40 points et l’autre pour la technique valant 20 points.
Le candidat A a obtenu les notes suivantes : 10/10 au critère prix (meilleur prix), 4/10 au sous-critère recommandation et 4,5/10 au sous-critère technique.
Le candidat B a obtenu les notes suivantes : 5/10 au critère prix (prix moyen des offres), 8/10 au sous-critère recommandation et 6/10 au sous-critère technique.
Note apparente
Candidat A : critère prix 40 pts (10/10 x 40), sous-critère recommandation 16 pts (4/10 x 40), sous-critère technique 9 pts (4,5/10 x 20).
Le candidat A obtient 65 points, c’est apparemment la meilleure offre, ce candidat devrait être retenu.Candidat B : critère prix 20 pts (5/10 x 40), sous-critère recommandation 32 pts (8/10 x 40), sous-critère technique 12 pts (6/10 x 20).
Le candidat B obtient 64 points, seconde offre, le candidat B ne serait pas retenu.
Note conservant le poids relatif des critères
Dans le sous-critère 1 « recommandation », la meilleure note est 8/10.
- La note du candidat A, 4/10, lui donne 20 pts (4/8 x 40 pts).
- La note du candidat B, 8/10, lui donne 40 pts (8/8 x 40 pts).
Dans le sous-critère 2 « technique », la meilleure note est celle d’un troisième candidat avec 7/10.
- La note du candidat A, 4,5/10, lui donne 12,9 pts (4,5/7 x 20 pts).
- La note du candidat B, 6/10, lui donne 17,1 pts (6/7 x 20 pts).
Résultat
- Candidat A : 72,9 points (40 + 20 + 12,9), seconde offre ; le candidat A n’est pas retenu.
- Candidat B : 74,1 points (20 + 40 + 17,1), meilleure offre ; le candidat B est retenu.
Ainsi calculé, le prix de la prestation n’est pas le critère dominant, le risque de tirer la qualité de la prestation vers le bas et d’accroître le risque d’insatisfaction est évité. L’expertise et la valeur ajoutée apportées par le prestataire sont privilégiées.
Noter la démarche RSE
Il est possible, même recommandé selon La Filière communication, de faire un critère à part entière et noté de la démarche RSE si elle concerne le marché. Cela permet de valoriser à la fois l’achat public responsable et les candidats qui mettent en œuvre leurs engagements éthiques, sans les désavantager au regard des éventuels coûts supplémentaires engendrés par ces actions. La RSE seule étant une notion trop générale, elle doit être appuyée par des considérations sociales et environnementales précises qui permettent d'être prises en compte pour l’attribution ou l’exécution d’un marché public.
L'obtention de labels RSE ou environnementaux, un savoir-faire en éco-conception ou une politique de ressources humaines visant à développer le capital humain, sont autant d'exemples concrets d'engagement vertueux des candidats.
Bien évidemment, une difficulté subsiste : savoir évaluer les performances annoncées par les candidats pour chacun des critères. La direction de la communication doit être en capacité d’évaluer la vraisemblance des offres grâce à sa connaissance du marché, des métiers et des prestataires. Elle peut alors se réserver la possibilité de disqualifier les offres anormales au regard des pratiques professionnelles connues (prix trop bas ou trop élevé, délai irréaliste, références surévaluées, compétences amplifiées, etc.).
La collectivité doit aussi chercher à évaluer la capacité en ressources humaines des candidats. C’est la garantie que le prestataire pourra accompagner la collectivité tout au long de la prestation et intégrer ce nouveau contrat dans son activité.
À vous, responsables de communication, de parvenir à faire partager, à l’ensemble des membres de la commission d’appel d’offres ou au service des achats, la spécificité des achats de communication et le sens des critères retenus pour ce type de marché.
(1) La Filière communication, sous l’égide du ministre de l’Économie, rassemble des professionnels exerçant différents métiers apparentés à la communication.
(2) Le guide « Les prix dans les marchés publics », annexe 1, publié en 2013 par la Direction des affaires juridiques du ministère de l'Économie.