Communication intercommunale : premières tendances du Baromètre 2023
En attendant les résultats complets, jetons un regard sur les chiffres du Baromètre 2023 de la communication intercommunale. Les spécificités et les difficultés actuelles de la communication des intercommunalités y sont vues par leurs communicants mais aussi par leurs élus, dircabs et DGS. En quelques années, la communication a pris toute sa place dans ces collectivités. Mais améliorer l'identification des intercommunalités et rendre plus efficace la coordination entre leur communication et celle des communes membres restent des challenges qu’éclaire notre étude.
Nous l’avions constaté en 2019 à la vue des résultats de la 5e édition du Baromètre de la communication intercommunale. Après la fusion des intercommunalités imposée par la loi NOTRe de 2015, les nouvelles grandes communautés se sont rapidement dotées d’un service communication. Et aujourd’hui, pratiquement toutes les intercommunalités disposent d’un service ou d’une direction. Même pour les communautés de communes : environ 85 % d’entre elles possèdent une communication structurée avec des professionnels et un budget.
Bien installée, la communication des intercommunalités dispose de moyens qui ne semblent pas être affectés par les restrictions qui s’imposent à d’autres collectivités. Qu’il s’agisse des personnels, des outils et des budgets, ou que l’on prenne en compte le nombre d’actions produites et le nombre d’outils mobilisés, les intercos reconnaissent globalement que leurs moyens ont été en hausse ces dernières années et qu’il devrait en être encore de même dans les prochaines. À noter toutefois que les élus, cabinets et DGS ne portent pas tout à fait le même regard que les communicants. Sur les perspectives d’évolution des budgets de communication, la tendance est à l’augmentation, estiment 50 % des élus, cabinets et DGS, alors que seulement un quart des communicants partagent le même constat.
Le Baromètre de la communication intercommunale
Le Baromètre de la communication intercommunale est une enquête effectuée auprès de ceux qui sont chargés de la communication au sein des intercommunalités : communicants, élus, cabinet ou DGS, selon les intercos.
Il est conduit depuis 2008 par l’association des élus Intercommunalités de France, l’agence Epiceum, l’institut d’études Occurrence et le réseau Cap’Com.
Le groupe de travail de cette année a été composé de Marie Cailleaud – Tulle agglo –, Elsa Pradier et Yohann Jacquet – Intercommunalités de France –, Christian de la Guéronnière – Epiceum –, Pierre Chavonnet – Occurrence –, Yves Charmont et Bernard Deljarrie – Cap’Com.
La sixième vague de ce Baromètre a été réalisée par un mailing envoyé auprès des 1 253 communautés. Les résultats s’appuient sur 221 questionnaires exploités, soit un taux de retour de 16 % pour les communautés de communes et de 26 % pour les communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles. Les répondants sont pour 56 % les communicants des intercos et pour 44 % les élus, membres de cabinets ou DGS.
L’étude a été réalisée en septembre et octobre 2023 et ses résultats complets seront publiés dans le mois, mis en ligne et analysés par les partenaires du baromètre. Une présentation partielle en sera faite lors du prochain Forum Cap'Com à toulouse lors de l'atelier du mercredi 6 décembre à 15 heures : "transition environnementale : travailler entre institutions". Les cinq éditions précédentes du Baromètre ont été menées en 2008, 2011, 2013, 2015 et 2019.
La com sur les services pour développer l’identification de l’institution
Cette montée en puissance de la communication a conduit à une meilleure reconnaissance des intercommunalités par les habitants des territoires. Les intercommunalités se sentent mieux perçues aujourd’hui qu’il y a quelques années : un sentiment partagé par la moitié d’entre elles. Cette progression est une bonne chose alors même que les territoires ont été bouleversés, que les compétences se sont élargies et que de nouveaux conseils intercommunaux ont été élus en 2020.
Pour contribuer à une meilleure identification de leur territoire, les intercommunalités ne lésinent pas sur les moyens. Dans près d’une intercommunalité sur deux, un travail sur l’identité est accompli et donne lieu à des campagnes d’image ou à des événements fédérateurs. Mais le moyen mis en œuvre dans deux tiers des intercommunalités reste le marquage des infrastructures et des services intercommunaux. Parvenir à apposer son logo sur les services publics intercommunaux est en effet essentiel. Mais ce n’est pas toujours évident lorsque la communication est partagée avec des communes ou est assurée par un délégataire. Par exemple, selon les intercommunalités, dans près de 60 % des cas où un service public est délégué, c’est le délégataire qui assure la communication ; dès lors, l’identification de l’intercommunalité est modeste voire inexistante.
Et pourtant, c’est bien la communication sur les services publics et infrastructures utilisés au quotidien par les habitants qui contribue à susciter un sentiment d’appartenance à un territoire commun. Élus, cabinets, DGS et communicants en sont tous persuadés. 86 % d’entre eux reconnaissent que cette communication concrète, pratique, utile, contribue grandement au sentiment d’appartenance. 81 % avouent aussi que cela contribue à créer une relation de confiance entre les élus et les habitants. Des élus qui malheureusement restent éloignés des habitants en raison même de leur mode d’élection.
Le manque d’incarnation politique
L’identification du territoire souffre du manque d’incarnation de ses élus. Le mode de scrutin en est la cause. En n'offrant qu’un seul bulletin de vote mentionnant une liste de candidats aux élections municipales et une liste des candidats au mandat de conseiller communautaire qui lui est liée, le mode de scrutin adopté en 2013 n’a pas été conçu pour permettre un progrès dans le sens d’une meilleure identification par les citoyens de leurs élus intercommunaux. Pas étonnant si à peine un tiers des élus, cabinets et DGS reconnaissent que l’incarnation de leur président porte la notoriété de leur interco. Et à peine 20 % des communicants avouent qu’ils parviennent à travailler l’identification de leur territoire en s’appuyant sur la popularité de leurs élus.
La coordination des communications
La perception que les habitants ont de leur intercommunalité est aussi entachée par la difficulté qu’ils ont à distinguer les messages municipaux des messages communautaires. Une grande majorité des communicants, des élus, dircabs et DGS des intercos reconnaissent que les habitants font difficilement la différence et ne perçoivent les messages que de manière relativement brouillée. Moins d’un quart d’entre eux affirment que cette distinction entre com intercommunale et com communale apparaît clairement.
La question centrale pour les intercommunalités reste donc la coordination entre leur communication et celle des communes membres.
Les notions de mutualisation ou de coordination ne font pas l’objet d’une définition juridique précise dans le Code général des collectivités territoriales. Elles renvoient à un ensemble d’outils qui permettent aux collectivités et à leurs groupements de mettre en commun leurs moyens (de façon pérenne ou temporaire) et de coordonner leur action en vue de l’élaboration de leurs projets ou la gestion de leurs services sans qu’il ne soit créé d’entité juridique distincte. Les réalités sont donc très variées et les moyens partagés peuvent être de différentes natures (personnels, moyens techniques ou financiers, patrimoine). Durant toute la décennie 2010, la mutualisation des services entre les intercommunalités et leurs communes membres a été promue sous l’impulsion des élus et des équipes techniques, mais aussi grâce à des incitations législatives. La mutualisation de la communication figurait alors parmi les priorités.
Aujourd’hui, les élus, le dircab et les DGS sont presque une majorité à estimer que la communication de leur interco est mutualisée ou coordonnée avec celle des communes membres. Mais cette vision optimiste n’est pas entièrement partagée par leurs communicants. Ils ne sont qu’un tiers à reconnaître cette coordination. Pour la grande majorité d’entre eux, leur service communication ne se coordonne pas du tout avec la communication des communes. Car, pour eux, cela voudrait dire partager la stratégie, les ressources et les supports pour co-construire une communication servant l’image des deux institutions, ce qui est très rarement le cas.
Près de la moitié des intercos mettent toutefois en place des actions ponctuelles de communication en coordination avec les communes de leur territoire. Ces dernières années, il semble que cette coordination se soit souvent faite autour de communications de crise. Des crises qui n’ont en effet pas manqué – crise sanitaire et dérèglement climatique avec son lot d’incendies ou d’inondations. En revanche, la mise à disposition pérenne d’outils ou d’actions de communication – le journal territorial ou le site internet par exemple – reste relativement rare. À peine un tiers des intercos reconnaissent ce partage. Quant à partager des personnels ou des moyens de production – imprimante, logiciel ou équipement –, cela reste parfaitement marginal (5 %).
La communication des intercommunalités ne peut pas s’envisager sans une coordination entre les collectivités qui la composent. Cela devrait passer par une définition commune de grands objectifs, la mise en place d’une stratégie partagée, la mise en commun d’actions et de moyens, et des relations continues entre les communicants.
Une seconde analyse du Baromètre 2023 de la communication intercommunale, à découvrir dans une prochaine édition de Point commun, nous permettra de distinguer les thématiques que porte la communication intercommunale et les outils qu’elle met en œuvre. Cette analyse permettra notamment d’identifier les moyens de mieux coordonner la com des intercos avec celle des communes membres.