Fake news, tous responsables
Les fausses nouvelles se répandent plus vite et plus largement que les vraies. On s’en doutait ! Un trio de chercheurs du Medialab du prestigieux Massachussets Institute of Technology l’a démontré dans leur étude, publiée dans Science et intitulée "Comment le mensonge se propage. Sur le média social, les fausses nouvelles écrasent la vérité." Sinan Aral, Deb Roy et Soroush Vosoughi ont analysé la diffusion de 126 000 tweets. Ils démontrent notamment que, pour toucher 1 500 personnes, il faut six fois plus de temps au vrai qu’au faux. Éléments d’explication : le faux est, plus que souvent que le vrai, lié au sentiment de surprise et au dégoût.
Par Alain Doudiès, consultant et ancien dircom
Sacrée bataille pour faire face à ce phénomène : les responsables politiques doivent s’en préoccuper. Nous verrons si la loi, annoncée par Emmanuel Macron, pour réprimer les fausses nouvelles, apportera quelques réponses… et suscitera ou non l’inquiétude des défenseurs de la liberté d’informer. Pour contrer les fake news, les médias sont en première ligne. Les Français le veulent. Un sondage (1) indique que, pour les personnes interrogées, la première attente vis-à-vis des journalistes est « qu’ils vérifient les informations fausses, les rumeurs, la désinformation » (61%), avant « qu’il apportent des informations pratiques » (49 %) et « qu’ils révèlent des faits ou des pratiques illégales ou choquantes » (48 %).
Les communicants, a fortiori les communicants publics en raison même de leurs responsabilités particulières, ne peuvent pas fuir ce front. Le 28e Forum Cap'Com - à Marseille en 2016 - l’a abordé avec la controverse « L’information échappe-t-elle au communicant ? ». Les vidéos « Tous fact-checkeurs » réalisées par France Télévision, Le Monde et Rue 89-Mooc, fournissent des ripostes.
Nous devons aussi balayer devant notre porte en écartant les nouvelles… pas tout à fait vraies, que nous produisons.
Nous devons chasser les fausses nouvelles qui portent atteinte aux collectivités pour lesquelles nous travaillons. Certes. Mais nous devons aussi balayer devant notre porte en écartant les nouvelles… pas tout à fait vraies... que nous produisons. Approximations avantageuses, chiffres enjolivés, descriptif tronqué, petits arrangements avec la vérité voire témoignages bidonnés : ces dérives sont trop courantes quand il faut donner les plus belles couleurs au seul sunny side of the street. Nous sommes là pour valoriser l’action de la collectivité. Oui. Nous n’avons pas l’obligation des médias de fournir des éléments contradictoires comme le point de vue de l’opposition. Encore que, pourquoi pas ? Mais nous devons au moins fournir des informations si ce n’est complètes, du moins parfaitement exactes et incontestables : le socle solide sur lequel les messages de l’institution peuvent s’appuyer. Et nous pouvons ainsi combler - en partie - la distance qui, traditionnellement, sépare l’ « information » et la « communication ». Vive l’information !
(1) Les attentes des Français envers les journalistes, l’information et les médias. Étude Viavoice réalisée pour les Assises internationales du journalisme. En partenariat avec France Télévisions, France Médias Monde, Le Journal du Dimanche et Radio France - mars 2018