L’UGC, c’est pas du cinéma !
C’est peut-être une question de génération. Ou de domaine d’activité. En tout cas, quand j’ai entendu parler d’UGC pour la première fois, j’ai d’abord pensé au réseau de cinémas. J’ai interrogé les copains de la compublique et, heureusement pour mon amour-propre, je n’étais pas la seule. Il n’y en a qu’un qui a évoqué l’UGC tel qu’on va en parler ici : le « User Generated Content ». Mais alors, en quoi ce concept peut-il servir la stratégie de communication interne de ma collectivité ?
Par Mary Mackay,
chargée de communication de Pays de Montbéliard Agglomération, membre du Comité de pilotage de Cap'Com.
En français, cela veut dire le « contenu généré par l’utilisateur ». En gros, ce n’est pas l’annonceur qui fait sa publicité mais les internautes, sur les canaux de communication qu’ils possèdent (les réseaux sociaux la plupart du temps), en publiant des avis, des posts, des articles, des liens, des vidéos… À ne pas confondre avec le travail qui peut être fait avec les influenceurs, qui eux sont rémunérés (sous une forme ou une autre) pour faire la promotion de tels ou tels produits ou marques.
Il faut bien avoir en tête que l’UGC relève d’une pratique non professionnelle et que c’est tout un chacun qui peut en faire. D’ailleurs, vous vous dites peut-être en lisant ces quelques lignes que vous en produisez également. Oui, oui : quand vous mettez un avis sur un restaurant, quand vous postez un selfie depuis le dernier monument public visité, quand vous écrivez un article dans votre blog sur votre coup de cœur littéraire des vacances… J’en connais qui vont brandir ce concept au prochain repas de famille pour épater la galerie !
Pourtant la parole n’a pas toujours été libérée
En communication interne, on parle souvent de la communication ascendante, descendante et transversale. Mais ça reste interne, encadré dans une matrice dont les frontières se conjuguent avec celles de notre environnement professionnel. Les supports sont calibrés, les contenus sont intégrés dans un mix média, les espaces de dialogues – quand ils existent – sont formatés. Jeter un œil aux publications personnelles des agents, sur des sujets professionnels, c’est faire un pas de côté, une manière différente d’observer les tendances internes.
Au fil du temps, l’expression de la parole des agents n’a pas été la même. Avouez que c’est quand même cocasse. À une époque pas si lointaine, les agents avaient interdiction d’adresser la parole à un journaliste. Chasse gardée de l’attaché de presse, du cabinet et des élus. Qui brandissaient l’obligation de réserve, de discrétion ou de secret professionnel (surtout on amalgame et on n’explique pas la différence). Ensuite il y eut quelques entorses au règlement. Les journalistes n’ayant franchement pas toujours envie d’avoir systématiquement le même élu au micro. Alors interroger un agent, pourquoi pas, mais à grand renfort d’éléments de langage (suivis à la lettre, empêchant le naturel de faire surface, à la différence de la pratique de certains élus). On accorde la parole, certes, mais on l’encadre. On va apprendre aux agents à s’exprimer, à « bien dire ce qu’il faut dire », avec un rappel des obligations (ou plutôt des risques) pour éviter un bad buzz ou une crise.
Aujourd’hui, avec l’avènement des réseaux sociaux, tout le monde peut s’exprimer. Il n’y a qu’à aller sur TikTok ou LinkedIn pour voir ces comptes d’agents, parfois très pro… parfois plus originaux ! Ça pourrait partir dans tous les sens et pourtant il n’en est rien. Rares sont les agents qui critiquent ouvertement et négativement leur employeur. Au contraire, un agent prendra spontanément la parole plutôt pour valoriser son action, celle de son service ou de la collectivité. Des propos souvent qualitatifs d’ailleurs, parce que, justement, authentiques.
De la pratique personnelle à la stratégie professionnelle : il n’y a qu’un pas
Pourquoi la communication interne a-t-elle tout intérêt à s’intéresser à ces UGC ? Parce que sa force réside sur sa base. Et qui fait la base de la communication interne ? Les agents ! S’intéresser à ces nouveaux contenus, c’est une autre manière de s’intéresser aux agents, à ce qu’ils font pour la collectivité, à ce qu’ils sont. Je me prends à imaginer une nouvelle rubrique sur mon internet ou mon magazine interne, « Vu sur les réseaux » ou « Les agents le disent », avec une reprise des posts, des repartages de vidéos (l’inauguration d’un bâtiment, la visite d’un site…) ou un dialogue constructif agent / collectivité / internaute en commentaire d’un post Facebook par exemple. Pointer vers des contenus proposés par les agents, en reprendre les expressions, les codes… Bref, les idées ne manquent pas pour inclure cette parole spontanée qui participe à faire la communication externe de sa communication interne. Vous me direz que ce n’est que mettre un nom de concept sur une pratique déjà connue. Pas si sûr. Et puis, si ça va sans dire, ça va toujours mieux en le disant.
En portant la voix de chacun, la collectivité s’offre une autre manière de capitaliser sur ce qui fait sa richesse : les hommes et les femmes qui la composent et qui sont fiers de leur travail.
Intégrer l’UGC comme partie prenante de notre communication interne, c’est tout à la fois une exposition gratuite qui valorise les talents et expertises internes, une mise en avant de la collectivité (qui peut, par la même occasion, accroître sa notoriété), un levier d’engagement des agents et un gage de confiance à l’interne comme à l’externe. Des opportunités qui ne sont pas sans rappeler celles recherchées dans la mise en place d’une marque employeur (mais je n’ose plus prononcer ces mots depuis les dernières Rencontres nationales de la communication interne). En portant la voix de chacun, la collectivité s’offre une autre manière de capitaliser sur ce qui fait sa richesse : les hommes et les femmes qui la composent et qui sont fiers de leur travail. Des fondations solides pour une stratégie de communication interne centrée sur l’agent avant tout.
Photo d'Alex Litvin pour Unsplash.