Pages de com : « En haut de l’affiche », par Tanguy Demange et Pascal Grégoire
Voilà un ouvrage qui se regarde autant qu’il se lit. Dans lequel on plonge pour n’en ressortir que 100 ans plus tard ou qu’on picore au gré de ses envies. Tout à la fois rétrospective des campagnes d’affichage qui ont marqué des générations, décryptage fin des tendances, analyse des comportements de consommation ou encore critique des époques traversées, les exemples mis ici en avant servent tous d’hommage à l’art français de la publicité.
Pour ses 100 ans, Clear Channel France publie un livre-événement, pour rendre hommage à la créativité de la communication extérieure. À base d’images d’archives, de témoignages de créatifs, d’explications, d’illustrations, d’apports théoriques et historiques, ce livre fait appel à la mémoire, fait remonter des souvenirs et interpelle ; parce qu’on a tous au moins une anecdote personnelle liée à une de ces affiches.
L’affiche est l’art du condensé, de la synthèse et des raccourcis heureux, l’affiche est un tweet envoyé à l’esprit.
Pascal Grégoire, préface.
Une chose est sûre, l’affiche fait partie de nos vies et ce, dès le plus jeune âge. Que ce soit Mickey et ses copains à cinq ans, celles de nos boys bands préférés dans nos chambres d’adolescents, les collectors de films tout aussi cultes, les (fausses) vintages qui vantent les territoires… Mais celles présentes dans ce livre proposent une autre sélection. Celles-ci occupent l’espace public. On ne les choisit pas, elles s’imposent à nous, à notre regard, que l’on soit prêt ou non à les accueillir. Et voilà bien une première interrogation que l’on peut avoir en tant que communicant – public ou non –, celle du caractère invasif du message imposé au collectif dans un espace partagé.
« Revenir à l’essentiel, faire comprendre en une seconde »
Au fil des pages, on apprend des fondements théoriques, on découvre l’envers des créations, on se plonge dans une épopée qui se décline partout aujourd’hui. On revient sur l’histoire et l’évolution des affiches, dans leur dimension créative, parfois subversive. Illustrations, photographies, rapport entre l’image et les mots… des aspects qui font écho à nos métiers. Évidemment, les auteurs abordent à la fin tout le champ des possibles permis par l’affichage digital. Et de prévenir : « Tout le monde veut mettre des Powerpoint en affiche. Il faut revenir à l’essentiel […], faire comprendre en une seconde et avec une maîtrise parfaite des bases de la composition. »
Ici, la part belle est faite à la publicité et au marketing, même si quelques sujets d’intérêt général sont présentés : le service public des transports avec les sagas de la RATP, du transilien ou de la SNCF… mais (presque) toujours sous un angle commercial. Sauf l’iconique gilet jaune avec Karl Lagerfeld pour la sécurité routière : « C'est jaune, c’est moche, ça ne va avec rien, mais ça peut vous sauver la vie. » Une communication d’intérêt général que l’on verra éclore à partir des années 2000 et qui cherche encore sa personnalité. Et de pointer ici une seconde interrogation parfois évoquée en communication publique : la dualité entre le fait de vouloir être consensuel pour parler au plus grand nombre, mais qui fait que, souvent, on ne se fait pas remarquer. Alors que l’affichage cherche justement à démarquer.
« Retracer l’histoire de 100 ans d’affichage en France, c’est en effet ouvrir un album de famille présentant les artistes iconiques du début du XXe siècle tels Cappiello ou Savignac, l’âge d’or de la publicité dans les années 1970 et 1980, et jusqu’à la prise de conscience sociale et écologique des années 2000. »
En haut de l’affiche
Célébrons 100 ans d’affichage en France
Tanguy Demange et Pascal Grégoire
Novembre 2022
Éditions Le cherche midi
184 pages