Parole contre virus
Le département de Mayotte recherche l’efficacité face à l’épidémie de coronavirus et produit cinq clips qui tranchent dans le concert des communications sanitaires par leur angle et leur humanité.
Bien que les pronostics alarmants du mois d’avril n’aient pas été, heureusement, confirmés, Mayotte, île de l’océan Indien de plus de 250 000 habitants, reste classée orange. Elle présente toujours de forts risques d’extension de l’épidémie du fait de la densité d’une population trop souvent mal logée. La communication du département utilise depuis la mi-mai une série de cinq vidéos de deux minutes en moyenne pour influencer le comportement des habitants qui ne s’étaient pas toujours montrés très stricts sur les gestes barrières et les conditions du confinement.
Loin des campagnes classiques, très descendantes et souvent basées sur des chiffres et des recommandations sèches, il s’est agi ici de passer un message apaisé et fraternel, porté par des figures du quotidien local, personnel du bac inter-îles (« la barge »), chef religieux, anciens, sportif, artiste… Chacun parle de son quotidien et de la réalité du risque.
Le slogan Soyons distants, restons vigilants accompagne ces paroles et appuie ce nécessaire changement de comportement collectif qui est à l’opposé des usages. Pour le chanteur Bodo, « si nous ne respectons pas les consignes, nous serons certainement les derniers à sortir de cette crise ». On entend aussi des retraités (un homme et une femme) qui parlent de leur expérience de la distanciation en tant que personnes âgées (cliquez sur l'image ci-dessous pour lancer la vidéo).
Le choix du format est un autre point remarquable de cette campagne, dans un contexte où l’accès à l’information est problématique, pour des questions de langue, de formation, de moyens. Pour Bruno Cohen-Bacrie, dircom du département de Mayotte : « L’objectif était de réaliser des spots de sensibilisation en pensant aux publics les plus éloignés de l’écrit (illettrisme). » Il poursuit en parlant du parti pris linguistique : « Le processus est inversé par rapport à l'habitude dans une institution : l'audio est en shimaoré (ndlr : langue vernaculaire majoritaire) et la traduction en français dans les sous-titres. » Ces spots viennent enrichir la gamme des outils classiques de communication (affiches, magazine numérique…) utilisés face au Covid. Ils ont été tournés avec un ancien animateur local, Anli Bedja, connu des habitants, prompt à les rassurer pour prendre la parole.
Le résultat est une communication émouvante, loin des discours moralisateurs, et qui pourrait être efficace bien au-delà de l’outre-mer !
Les spots ont été diffusés à partir du lundi 18 mai pour trois semaines, à raison d'environ cinq diffusions quotidiennes sur Kwezi (TV et radio) et sur Mayotte Première (TV et radio). Le budget total a été d’environ 25 000 euros (dont 15 000 euros d'achat d’espace). C’est la société 2nzena Studio qui a produit les clips pour le conseil départemental. Campagne réalisée avec l’appui de l’État et de l’ARS.
Visionnez les épisodes ci-dessous (cliquez sur l'image ci-dessous pour lancer la vidéo) ou sur la page Facebook du département.