Pourquoi votre mère est-elle plus connectée que vous : panorama des médias sociaux 2024
C’est l’analyse qu’on attend chaque année depuis seize ans : le panorama des réseaux sociaux publié par Frédéric Cavazza, pionnier de la transformation digitale. Il est un peu la boussole pour nous, les communicants numériques. Celui qui nous permet de prendre un peu de hauteur et de mieux comprendre dans quel environnement digital nous baignons au quotidien.
Par Marc Cervennanky, responsable du centre web et réseaux sociaux de Bordeaux Métropole.
Alors, où en sommes-nous en 2024 ? Pour obtenir une vision d'ensemble, vous pourrez lire le panorama complet (lien en fin de chronique). Si vous n'en avez pas le temps, voici ce que j'en retiens.
Le nombre d’utilisateurs des médias sociaux dans le monde continue de progresser : plus de 5 milliards sur la planète, 266 millions de plus que l’an passé ! Le temps passé sur les écrans augmente également. Le temps moyen par jour est de 2 h 23 le nez collé sur son smartphone. Un petit peu moins en France avec 1 h 49.
Cela ne vous étonnera peut-être pas, mais TikTok tient le haut du pavé, avec 34 h de consultation par mois et par utilisateur. Le réseau chinois devient le centre de gravité, sujet de toutes les discussions et polémiques. Le réseau que certains copient et que d’autres veulent fermer.
Les plateformes se diversifient
Mais, au-delà des chiffres, ce qui ressort particulièrement c’est la diversification des plateformes utilisées. Il est bien fini le temps où Facebook détenait un quasi-monopole dans le domaine des réseaux sociaux.
La diversification s'accompagne d'un autre phénomène : le développement de microcommunautés. Celles-ci illustrent une fragmentation de la société, marquée par une indignation permanente et la défense d'intérêts particuliers. Les discussions s'alimentent elles-mêmes au sein de cercles restreints.
Un exemple de ce phénomène est l'utilisation croissante de WhatsApp par des groupes communautaires. Si ma mère de 80 ans, qui ne comprend rien à internet, sait néanmoins utiliser WhatsApp sur son smartphone pour seniors, cela mérite une attention particulière. Quelques collectivités commencent d’ailleurs à s’approprier WhatsApp pour des usages tant internes qu'externes.
Ce que souligne Fred Cavazza, c’est que les médias sociaux ne sont plus seulement des espaces de partage. Ils sont devenus des extensions de la vie quotidienne. Ils influencent nos habitudes et nos interactions sociales.
Comment être visible, audible quand chacun se regarde le nombril et ne s’intéresse qu’à ses centres d’intérêt ?
Cette fragmentation traduite en microcommunautés contraint-elle les communicants publics à subir cet état de fait et à être présents sur tous les réseaux pour atteindre l'ensemble des habitants ? Mais ont-ils d’ailleurs envie de nous y voir ?
À l’heure où la capacité à distribuer des magazines papier dans toutes les boîtes aux lettres est remise en question, se pose aussi le problème de l’accès et de la visibilité de la parole publique dans le monde numérique. Comment être audible quand chacun se regarde le nombril et ne s’intéresse qu’à ses propres centres d’intérêt ? Une tendance encouragée par les algorithmes des médias sociaux, sur lesquels nous tentons de nous faire une place, en copiant leurs codes de communication.
C’est fascinant, c’est effrayant. Ce sont des questions vertigineuses si nous prenons de la hauteur. Ce panorama 2024 vient confirmer qu’une communication uniformisée et descendante appartient au passé. Au-delà des choix stratégiques à opérer dans nos collectivités, il me semble indispensable de lever le nez du guidon pour réfléchir à la manière de traduire et transmettre ce qui doit faire société et sens commun.
C’est aussi (et surtout ?) le rôle de nos élus. Et nous avons peut-être la responsabilité de les sensibiliser à ces enjeux, s’ils ne le sont pas déjà.