Marketing territorial : des clés pour des territoires heureux
Quels sont les grands secteurs au sein desquels les professionnels du marketing territorial peuvent s’insérer pour construire une offre et une expérience heureuse du territoire ? Quelles initiatives, en expérimentation ou déjà en place, peuvent nous inspirer ? Alors qu’elle met en avant les conditions du bonheur citoyen dans les territoires et étudie la manière dont nos « terres communes peuvent être utilisées avec pour dessein d’y vivre harmonieusement en société », l’étude « Territoires heureux » de la Fabrique Spinoza donne à voir quelques pistes pour renouveler sa démarche d’attractivité et répondre aux enjeux du moment.
Publiée fin 2023, l’étude « Territoires heureux » menée par la Fabrique Spinoza – think tank dédié au bonheur citoyen – examine les facteurs qui contribuent à l’amélioration de la qualité de vie au sein des territoires. Considérant que « la crise sanitaire a affecté en profondeur les besoins des Français en renforçant les tendances en cours comme la quête de sens, de liens ou de modes de vie réinventés », l’étude propose des pistes de travail pour dessiner de nouveaux chemins d’épanouissement, jusqu’à façonner une réelle expérience de territoire. Alors que les stratégies et les pratiques du marketing territorial sont en transition depuis plusieurs années, l’étude invite à une réflexion constructive pour œuvrer au bien-être et à l’attractivité locale.
Dans son article « Marketing territorial, passer de l’attractivité à l’attachement », Marc Thébault mettait récemment en avant le nouvel enjeu pour la profession : « La question est aujourd’hui de savoir comment faire en sorte que l’on se sente bien, que l’on se sente chez soi […], que l’on se sente heureux […] voire de partager ce bonheur. » Il invitait à tenir compte des 12 grands principes qui structurent le territoire mis en avant par l'étude de la Fabrique Spinoza, pour aller vers une attractivité territoriale qui façonne le vivre-ensemble : identité, sentiment d’appartenance, raison d’être et hyperlien social notamment.
Huit grandes thématiques pour des territoires et modes de vie heureux
En corollaire, et pour rendre tangibles ces principes dans la vie des territoires, l’étude propose d’investir huit grandes thématiques pour créer de nouveaux modèles, plus vertueux et plus en phase avec les nouvelles aspirations citoyennes. Concrètes et inspirantes, ces « aménités socles apportent un éclairage fonctionnel au vaste thème de l’utilisation de nos terres communes, avec pour dessein d’y vivre harmonieusement en société ».
- l’éducation, ou apprenance territoriale : distribuée entre les différents acteurs sur l’ensemble du territoire ;
- la nature ou son évocation : à la bonne place, où que l’on soit ;
- la démocratie territoriale : proche des habitants et de leurs préoccupations ;
- le travail : au croisement du territoire générateur d’identités, de projets, d’espaces et de nouveaux modèles ;
- la transition alimentaire : outil sensible de transformation locale et de régénération du territoire ;
- l’économie circulaire : vers une transformation désirable et heureuse de la société ;
- la mobilité durable : une transformation positive qui mobilise innovation, sensibilisation, gratuité et mise en réseau ;
- la santé : réinventée localement par des lieux, de l’hybride, des collectifs et des incitations positives.
Si la totalité de ces thématiques peut être investie par les acteurs de l’attractivité, selon la vision, l’histoire ou encore la culture du territoire, focus sur quelques grands secteurs au sein desquels les professionnels du marketing territorial peuvent s’insérer pour construire une offre et une expérience heureuse. Quelles initiatives, en expérimentation ou déjà en place, peuvent nous inspirer ?
La nature : structurer une vision de l’aménagement du territoire
La nature joue un rôle important sur la santé globale des habitants, la cohésion sociale, le sentiment d’appartenance et l’identité locale, ainsi que le dynamisme touristique. Mais elle est également un élément structurant et de plus en plus essentiel pour l’aménagement des territoires.
D’une part, le concept de « paysages urbanisés durables » permet de « diminuer la fracture entre une ruralité qui serait naturelle et une ville qui serait artificielle ».
D’autre part, la nature permet de penser l’urbanisme et la construction de manière écologique, venant traduire concrètement et contribuer à un engagement pour un territoire neutre en émissions carbone, soucieux d’une artificialisation raisonnable ou encore de performances thermiques écologiques.
C’est ainsi que Grenoble Alpes Métropole s’engage par exemple dans le développement de la construction bois au travers de son plan climat air et énergie et de son orientation d’aménagement et de programmation (OAP), pour réduire son empreinte carbone et remettre de la nature en ville.
Pour soutenir et mettre en œuvre ce type de vision, le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires a mis en place un fonds vert, dispositif d’aide aux collectivités afin d’apporter de la nature dans les espaces urbanisés.
Le travail : co-construire des filières attractives et de nouveaux liens
Dans de nombreux cas, l’installation de nouveaux habitants passe par le biais du travail et de l’emploi. Pour accompagner la visibilité et le dynamisme économique local – et outre les dispositifs d’attractivité des talents tels que les jobdatings, les dispositifs d’accueil ou encore de marque employeur –, l’accompagnement de la structuration de filières d’excellence, en lien avec l’ensemble des acteurs locaux, permet notamment aux territoires de se réapproprier leur histoire, leur culture, pour faire (ré)émerger une identité et un vrai savoir-faire.
Le développement de labels « Made in région » est également susceptible de dynamiser l’économie locale et de répondre aux aspirations des habitants en matière de consommation. Enfin l’accompagnement de la mise en place et du développement de tiers-lieux permet d’ancrer localement des activités et des conditions de travail attractives, tout en renouvelant les modalités du vivre-ensemble. Aussi – et considérant que les tiers-lieux sont des acteurs incontournables pour le dynamisme des territoires – le groupement d’intérêt public France tiers-lieux a pour vocation d’appuyer l’émergence et la pérennisation des tiers-lieux.
La transition alimentaire : source de bien-être et de nouvelles formes d’attractivité
Réalisé par l’Obsoco, le Baromètre de la consommation et de la perception des produits biologiques en France indique que 54 % des Français ont changé leurs comportements alimentaires entre 2019 et 2021. Que ce soit pour des raisons éthiques, écologiques, de souveraineté ou de santé : les habitants et consommateurs sont sensibles à la transition alimentaire. L’accès à une alimentation saine et produite de manière responsable est donc vecteur d’épanouissement. Et la promotion d’une articulation renforcée entre le « bien produire » et le « bien manger » peut contribuer au caractère attractif d’un territoire.
Ainsi, la mise en œuvre et la structuration de projets alimentaires territoriaux, tels que celui du Sicoval, permettent de renforcer l’agriculture et l’identité culturelle du territoire, tout en participant à la santé des habitants et au lien social. En outre, la transition alimentaire peut être l’amorce de nouvelles formes d’offres touristiques (agritourisme) ou d’un nouveau développement économique local tel que le cursus « chef de projet en alimentation durable » développé par l’université de Nice.
La mobilité : un enjeu central et aux multiples facettes
Outil de la vie quotidienne, la mobilité durable concentre de nombreux enjeux. Elle contribue à réduire les émissions de carbone et vient soutenir l’efficience de dispositifs locaux de transition écologique tels que La Rochelle territoire zéro carbone. Enjeu social, l’accessibilité des moyens de transport – qu’ils soient individuels ou collectifs – est un vecteur d’inclusion, générant des changements de vie et un impact positif sur l’épanouissement.
Ainsi, Grenoble Alpes Métropole et son CCAS ont créé une agence mobilité pour détecter et accompagner les personnes pour qui la mobilité serait un frein à l’emploi. La communauté de communes de la Plaine de l’Ain a quant à elle lancé un service de transport à la demande pour réduire la fracture mobilité en milieu rural. Au-delà, la mobilité durable offre une réelle opportunité de positionnement touristique. Le comité régional du tourisme et des loisirs d’Occitanie a par exemple développé l’Occitanie Rail Tour, une offre de voyages en train pour encourager le slow tourisme et se positionner en destination innovante en matière de mobilités bas carbone. Le dispositif complet sera décrypté et partagé le jeudi 12 septembre dans le cadre des Rencontres nationales du marketing et de l’identité des territoires.
La santé : innover pour faciliter l’accès aux soins et attirer les soignants
La santé et l’accès aux soins sont un facteur clé pour l’attractivité des territoires. Outre par des infrastructures de qualité, la mise en place d’un environnement sain (espaces verts, loisirs, qualité de l’air et de l’eau) ou encore de technologies de télémédecine, de nombreux territoires et collectifs innovent en inventant de nouveaux modèles pour faciliter l’accès aux soins.
Avec le soutien des collectivités locales, et pour lutter contre les déserts médicaux, l’association Médecins solidaires a ouvert – depuis 2022 – quatre centres de santé dans la Creuse, le Cher et la Nièvre. S’appuyant sur le « temps partagé solidaire », les centres de santé accueillent des dizaines de médecins de toute la France qui viennent travailler une journée par mois, contribuant ainsi à réduire les difficultés d’accès aux soins de ces zones rurales. Vecteur de nouveaux liens mais aussi de nouveaux services de proximité, les tiers-lieux représentent également de réelles opportunités pour innover en la matière. En ce sens, le département de l’Isère impulse par exemple la mise en place de tiers-lieux qui comprennent fablabs, coworking, téléconsultations médicales et prises de constantes vitales dans les espaces de travail.
Rendez-vous en septembre au Louvre-Lens pour les Rencontres nationales du marketing et de l’identité des territoires
Comment renouveler le lien pour fiabiliser un attachement au territoire ? Que ce soit à destination des habitants, des acteurs socio-économiques ou bien des touristes : comment les professionnels de l’attractivité peuvent-ils contribuer à façonner une expérience unique pour ancrer les nouveaux venus ? Les 11 et 12 septembre, une centaine de professionnels de l’attractivité et du marketing des territoires se rassembleront au musée du Louvre-Lens pour répondre à ces questions, partager leurs expériences et enrichir leurs réflexions stratégiques.
En ouverture de ces Rencontres nationales du marketing et de l’identité des territoires, Alexandre Jost, fondateur de la Fabrique Spinoza et superviseur de l’étude « Territoires heureux », interviendra aux côtés de Marc Thébault. Ils apporteront grains à moudre et outils concrets pour œuvrer au développement de territoires heureux et attachants.