Adapter la fonction communication aux nouveaux impératifs de la transition environnementale
« Les communicants doivent affronter un formidable défi. Depuis la réelle intégration de la fonction au sein des organisations publiques et privées au milieu des années 1980, leur métier s’est fortement transformé. Ce qui se joue actuellement n’est toutefois pas de l’ordre de la simple évolution, c’est un saut qualitatif qui se préfigure. L’enjeu est de taille, il s’agit d’adapter la fonction communication aux nouveaux impératifs environnementaux et d’abord à la contrainte climatique. » C’est par ces mots que s’ouvre le nouveau Guide de la communication responsable, publié par l’Ademe.
L’auteur de la préface, Thierry Libaert, expert en communication des organisations et conseiller au Comité économique et social européen, y explique que la communication responsable, ce n’est pas que la conception responsable des actions de communication, ni la communication sur la responsabilité sociétale de l’organisation, mais « qu’il s’agit plus fondamentalement d’un questionnement constant sur la responsabilité de la communication face aux nouveaux enjeux de la transition écologique ».
Contribuer à une société davantage en phase avec les limites de notre planète
Cet ouvrage est d’abord un guide pratique qui donne de nombreux conseils et exemples. Les leviers d’actions concrètes y sont listés, de l’écoconception à la réduction de l’impact du numérique, de la gestion des crises environnementales en passant en revue les dérives du greenwashing.
Mais surtout, l’ouvrage pose les sujets essentiels de la transition environnementale et explique que la mission de la communication des entreprises privées comme des organismes publics, « ce n’est plus seulement de promouvoir une organisation, ses activités, ses produits, c’est de contribuer à l’avènement d’une nouvelle société davantage en phase avec les limites croissantes de notre planète ».
Bien évidemment, l’ouvrage s’adresse principalement aux communicants des entreprises privées. Ce sont eux qui diffusent de façon massive des messages prescrivant des comportements de consommation ou des représentations sociales de ce qui est désirable pour soi-même ou pour la société. Un système qui a conduit à la crise environnementale d’aujourd’hui.
Le débat qui s’est tenu le 21 janvier dernier à Sciences Po Paris a parfaitement illustré les tiraillements que rencontrent les communicants des entreprises face à ce nouvel enjeu. Le modèle de production tourné vers l’économie de la fonctionnalité – moins de biens rendant davantage de services – ou le développement d’une offre et d’un marketing plus responsables, bousculent trop de certitudes, d’habitudes et de positions acquises.
Une responsabilité importante repose sur les communicants publics
Mais pour Thierry Libaert, qui collabore depuis plusieurs années avec le réseau de la communication publique, une responsabilité importante repose sur les communicants publics. « Depuis plusieurs années, nous avons souhaité à Cap’Com nous situer dans une démarche positive et constructive sur les sujets liés à la communication responsable et, au-delà, à la responsabilité du communicant public face aux grands enjeux de la transition écologique », explique-t-il. Les signaux sont désormais suffisamment importants pour nous inciter à multiplier nos efforts tant les enjeux que nous portons dans les collectivités territoriales sont au cœur des problématiques actuelles, notamment climatique. La responsabilité du communicant public n’est pas une question de technique, c’est une question politique, philosophique, existentielle. Elle interpelle notre fonction à tous les niveaux, notre rôle d’influenceurs auprès de nos élus, de sensibilisation, de mise en place de démarches participatives, de concertation, et bien d’autres.
Mesurons donc ce nouvel enjeu, préparons-nous à l’adaptation de notre mission et de notre métier, et renforçons la capacité de la parole publique à se faire entendre pour accompagner cette transition annoncée. La réflexion est engagée au sein de Cap’Com où communicants publics et experts travaillent à relever le défi.
L’opinion que nous avons sur l’évolution prévisible du monde ne guide pas forcément notre comportement quotidien
La table ronde tenue à Bordeaux dans le cadre du 31e Forum de la communication publique a servi de déclencheur. « Comment accompagner l’appropriation citoyenne de la transition environnementale ? » s’interrogeaient les participants en décembre dernier. « Peut-être faut-il se rappeler, y expliquait Erwan Lecœur, sociologue et ancien dircom, que l’opinion que nous avons sur l’évolution prévisible du monde ne guide pas forcément notre comportement individuel. » La transition environnementale sera nécessairement collective. Et si les entreprises visent les désirs individuels des consommateurs, c’est la parole publique qui s’adresse à l’intelligence de la collectivité des citoyens.
Les communicants publics doivent donc prendre toutes leurs responsabilités face à la transition environnementale pour que la parole publique accompagne les citoyens et les mobilise. Et ils doivent se préparer à de nouvelles missions et en revendiquer les moyens. L’année 2020 va être marquée par cet enjeu et le prochain Forum de la profession, à Rennes en décembre prochain, s’en fera fortement l’écho.