Des experts internationaux se penchent sur la défiance citoyenne
Le groupe d’experts de l’OCDE en communication publique vient de se réunir pour la première fois en présentiel à Paris au siège de cet organisme de coopération internationale. Pendant deux jours, les participants, dont le représentant du réseau Cap’Com, ont exploré les nouvelles voies de dialogue citoyen. De nombreux exemples venus d’horizons très différents ont été exposés. La France, représentée par le Service d’information du gouvernement, a présenté ses initiatives en matière d’inclusion, sujet abordé en conclusion avec Michaël Nathan, son directeur.
Cela fait des années que la division « gouvernance transparente » axe une partie de ses travaux sur une communication publique efficace. D’où la constitution de ce groupe de travail et le choix de l’intitulé de cette 5e conférence d’experts : « Mieux se connecter avec les citoyens ». Outre un rapport important concernant les questions d’inclusion, désormais disponible, ces rencontres des 26 et 27 septembre à Paris (également en ligne) furent l’occasion de décrypter des initiatives provenant de pays des cinq continents, lors de discussions, d’ateliers, de sessions de partage de bonnes pratiques ou même de travail en commun.
L'événement s’est concentré sur la manière dont les gouvernements peuvent engager le dialogue avec les citoyens et renforcer la confiance du public à travers leur communication. C’était également l’occasion de présenter des activités d'apprentissage pilotes liées à la future initiative de l'OCDE pour la professionnalisation de la communication publique.
Partager les pratiques en communication publique à travers le monde
Pour se faire l'écho de temps de réflexion sur la communication publique au niveau international comme celui de l'OCDE, et favoriser aussi l'échange de bonnes pratiques entre communicants publics du monde, Cap'Com édite Commonality, une newsletter en anglais. N’hésitez pas à partager cet outil dans votre réseau professionnel international et auprès des communicants publics de vos territoires jumelés.
La crédibilité de la parole publique au cœur des échanges
Parmi ces nombreuses interventions, un certain nombre, portant sur la question de la crédibilité de la parole publique, présentaient un intérêt pour tous les organismes publics, quelle que soit leur taille. En voici quelques expressions, prises sur le vif.
Benjamin Toff – Reuters institute :
« Les citoyens ont plus ou moins confiance en leur gouvernement ou leurs médias en fonction de leur expérience. »
« Nous avons tendance à nous dire que la confiance est toujours quelque chose de positif. Dans beaucoup de cas, cela est vrai. Mais avoir trop de confiance peut aussi poser problème. La méfiance envers les institutions publiques peut être fondée, quelquefois. »
« On observe une plus grande consommation fugace et déconstruite de l’information, qui est dépendante des algorithmes. Il y a une baisse du rapport de familiarité, qui se construit dans la durée. Comme il n’y a plus de relations aussi fréquentes, cela génère cette difficulté à démêler les informations. Donc certains publics gardent un scepticisme vis-à-vis de toutes les sources d’information. Et, c’est un comble, ils peuvent se tourner alors vers des sources moins fiables. Les espaces de critique du journalisme traditionnel sont en plein essor ; ils présentent des interprétations alternatives de la réalité. Il y a dans ces groupes une exposition répétée à certains messages, une influence par l’accumulation. »
« Les plateformes renforcent les effets de communauté. Il y a aujourd’hui un phénomène d’évitement de l’actualité, Il est plus facile que jamais d’en être déconnecté, car les plateformes peuvent le renforcer par leurs algorithmes. »
Mariana Prats – OCDE – analyse des résultats de l’enquête de l'OCDE sur les déterminants de la confiance et implications pour les communicants publics :
« L’alignement partisan aliène la confiance des citoyens mais aussi de l’administration, de l’institution. »
« La perception que le système ne marche que pour certains est un élément à prendre en compte. Et la compublique a un rôle à jouer. »
« Les initiatives de compublique doivent reconnaître les citoyens et prendre en compte leurs attentes. »
« En Finlande, pendant la pandémie, un dialogue a été maintenu avec les groupes les plus marginalisés, les plus défiants, par le biais d’associations. »
Sébastien Valère – SIG :
« En France, il existe trois grands principes qui guident la coordination du projet de communication accessible : la continuité, l’adaptabilité et l’égalité. »
Aapo Riihimäki – spécialiste des communications, bureau du Premier ministre, Finlande :
« Pendant l’épidémie du Covid-19, nous ne touchions pas les publics éloignés des grands médias, les jeunes particulièrement ; nous avons donc sollicité des influenceurs des réseaux sociaux et nous leur avons envoyé régulièrement des informations par mail. Nous les avons tenus au courant et leur avons donné les informations les plus importantes sur l’épidémie. D’abord il y a eu 900 influenceurs, puis, après plusieurs mois, 1 800. »
« 97 % des influenceurs ont trouvé que cette campagne était nécessaire et réussie. »
Angela Kamper – directrice exécutive, département du service client, Nouvelle-Galles-du-Sud, Australie :
« Pendant la pandémie, nous avons développé les services dématérialisés. Aujourd’hui nous nous apprêtons à proposer aux habitants de leur délivrer des certificats de naissance numériques. »
Ivan Yeo – directeur, ministère de la Communication et de l’Information, Singapour : « Dans le contexte du Covid, spécifique, nous étions préoccupés par ce qui était vrai ou faux. Dans d’autres contextes, il y a des zones d’ombre et des subtilités : “Qu’est-ce qui relève de la politique ou des faits ?” Dans le cadre de la pandémie, c’était plus tranché, et nous avons fait des efforts pour diffuser l’information de santé publique. Nous avons donné l’occasion aux personnes de s’exprimer, pour qu’elles puissent dire ce qu’elles croient. »
Seung-Ho Choi – directeur adjoint, Agence de la communication des risques, du contrôle et de la prévention des maladies, Corée du Sud :
« Nous avons contré une infodémie, en diffusant des informations factuelles régulièrement, en collaborant avec le secteur privé. Nous avons aussi contacté des influenceurs et des célébrités. Le défi pour protéger les citoyens de l’infection était également un défi de communication, car, s’ils n’étaient pas informés, comment pouvaient-ils s’en protéger ? »
Une membre de l'OCDE dans le grand jury du Prix de la communication publique Cap'Com 2022
Cette année, un regard international se posera sur les campagnes de communication publique nommées au Grand Prix Cap'Com 2022. Karine Badr, analyste politique à l'OCDE, se penche sur les dossiers dans le cadre du grand jury chargé de désigner, fin octobre, les lauréats de l'année.