Huit leviers pour animer son réseau de contributeurs
Les intranets du secteur public ont récemment évolué après une importante période de refonte. Mais la question de l’animation d’un réseau de contributeurs pour assurer une remontée d’information et une production de contenus fiable, régulière et pertinente reste un enjeu majeur pour les communicants internes. Huit solutions pour embarquer les agents et les rendre actifs.
Les collectivités se sont dotées d’outils actualisés et plus performants : 55,6 % des répondants à l’étude 2023 sur l’état des intranets dans le secteur public ont refondu leur intranet il y a moins de trois ans. Mais la question de leur animation – grâce aux contributions d’un réseau d’agents actifs et impliqués – reste une préoccupation centrale pour les communicants internes. 68 % des collectivités locales et organismes publics disposent d’un réseau de contributeurs.
C'est un des leviers principaux pour faire vivre l’intranet, mais l’animer est une vraie difficulté. En témoignent les nombreux échanges qui ont eu lieu lors des dernières Rencontres nationales de la communication interne et autour de la présentation des résultats de l’étude 2023 sur l’état des intranets du secteur public. En s’appuyant sur l’expertise de Franck Confino et de Didier Rigaud-Dubaa – coauteurs de l’étude sur l’état des intranets dans le secteur public –, pointons quelques leviers pour assurer la bonne animation des réseaux de contributeurs et les rendre actifs à la vie de l’intranet.
Officialiser son réseau pour assurer reconnaissance et légitimité
En premier lieu, il est primordial que tous les acteurs directement ou indirectement concernés par le réseau soient valorisés et reconnus en tant que tels. Aussi, un réseau de contributeurs doit être officialisé au travers de la reconnaissance de la direction générale des services et par une inscription de cette fonction dans la fiche de poste de l’agent. Ce faisant, la direction générale accorde sa confiance aux producteurs d’information, et assure la légitimité du réseau.
Réfléchir très en amont aux gains pour les contributeurs
Parce que la production de contenus s’appuie sur la bonne volonté des contributeurs, elle doit en retour comporter des avantages. Les agents qui participent à la remontée et à la rédaction d’information doivent donc y trouver un intérêt en retour, gage de leur motivation à produire. Dès lors, des séances de « team building » ou des formations peuvent être mises en place pour les accompagner dans leur professionnalisation autour de la prise de photo, de l’écriture pour le web ou encore de la réalisation de vidéos à partir d’un smartphone par exemple. Cela participe à leur montée en compétences, mais peut également leur être utile dans leur vie personnelle. Ce qui les motivera d’autant plus. Il importe donc de réfléchir aux avantages que pourront tirer les contributeurs à participer à la vie de l’intranet. Et ce, dans le cadre d’une stratégie mise en place très en amont, dès le déploiement de l’outil.
Faire participer les agents dès la constitution du réseau
Plutôt que de demander aux directeurs ou chefs de service de nommer des correspondants – parfois pour de mauvaises raisons –, il importe d’inviter les agents à participer sur la base du volontariat, via un appel. Dès sa fondation, le réseau de contributeurs affiche ainsi une organisation participative et permet d’impliquer des agents motivés, en toute connaissance de cause.
Réunir physiquement et régulièrement le réseau
L’aspect humain est fondamental pour maintenir l’intérêt, mais surtout pour faire de ce réseau un lieu de partage et d’information. Réunir les contributeurs de manière régulière – une fois par trimestre par exemple – et conviviale – autour d’un petit déjeuner ou autre – leur permet d’échanger sur les problèmes qu’ils peuvent rencontrer, de partager leurs expériences, réflexions et outils. Selon l'étude sur l'état de l'intranet, de plus en plus de collectivités s'y astreignent, au moins une ou deux fois par an.
Mettre en place un outil pour les échanges et les contributions
Que cela passe par des formulaires avec des process assez cadrés, par un réseau social interne ou bien un canal de discussion plus informel (sur des outils tels que Teams ou Slack par exemple), il est important de proposer aux agents un espace d’expression. Cela leur permettra de proposer des idées auxquelles la communication interne pourra réagir ou encore de poser des questions précises pour se faire accompagner.
Être à l’écoute des appétences et compétences de chacun
Pour Franck Confino, consultant en numérique pour le secteur public et coauteur de l’étude, il convient de modeler le rôle de chaque contributeur à ses propres appétences, pour tirer le meilleur de chacun : « Il y a des agents qui ont des talents cachés. J’en ai rencontré – dans des services techniques ou des cuisines centrales par exemple – qui écrivent des textes ou réalisent des vidéos très qualitatifs. Donc on prend le meilleur de chacun pour essayer de modeler un réseau, non pas en imposant une fiche de poste type mais bel et bien sur la base des compétences de chacun. »
Laisser à chaque direction la possibilité de communiquer pour ses agents
Sans forcément passer par un prisme de validation spécifique, laisser aux services la possibilité de créer des contenus d’actualité pour leurs propres agents peut s’avérer gagnant. Un service juridique pourra par exemple envoyer, de manière un peu brute, la dernière jurisprudence à ses agents. L’avantage d’un tel dispositif est que – de temps en temps – certaines informations pourront concerner l’ensemble des agents. Dès lors, la communication interne pourra la reprendre, sous un angle différent, plus vulgarisé ou plus pédagogique, pour s’adresser à tous.
Décentralisation de la production d’information et autonomie des directions : l’exemple de Pau
Lors des échanges qui ont eu lieu aux dernières Rencontres nationales de la communication interne, Kelly Soriano – responsable de la communication interne de la ville et agglomération de Pau – a partagé son expérience. Une contribution enrichissante autour d’un dispositif abouti.
« À Pau, nous avons un réseau de contributeurs que nous appelons “réseau de correspondants”. Cela afin qu’ils se sentent plus comme des journalistes. Nous avons refondu notre intranet il y a près de trois ans. Et sur cet intranet nous avons fait le choix de créer une page pour chacune des directions, pour qu’elles aient des espaces de communication qui leur soient propres. Nous avons monté le réseau de correspondants en allant voir chaque direction et en leur demandant de nous donner deux noms au minimum, pour créer des binômes. Nous les avons laissés autonomes dans l’objectif qu’ils soient acteurs de leur communication interne.
Bien sûr, nous les accompagnons au quotidien. Mais les systèmes de validation sont propres à chaque direction. Nous leur avons conseillé de monter leur propre comité de rédaction et de se rencontrer régulièrement. Libre à eux de définir la cadence. Et nous avons mis en place un Teams pour que les contributeurs puissent nous poser leurs questions, à nous la com interne, qu’elles soient techniques ou d’ordre rédactionnel. L’agent qui s’occupe de la gestion de l’intranet est également mobilisé pour leur répondre au quotidien.
En les laissant très autonomes, le réseau a bien pris ! Et nous, à la communication interne, cela nous sert aussi pour aller piocher des informations qu’ils émettent au quotidien et que nous pouvons faire remonter sur notre page d’accueil pour nous adresser à tous les agents lorsque l’actualité s’y prête. Aujourd’hui, nous avons environ 70 % des directions qui jouent bien le jeu. Et souvent, elles ont des correspondants qui sont sur la même fonction pour la communication interne et pour la communication externe. Alors bien sûr, après avoir mis en place cette organisation, il faut l’animer et ne pas lâcher. Notamment pour les directions qui produisent un peu moins. Mais cela est payant et nous sommes plutôt contents aujourd’hui. »
Dédier du temps pour l’animation du réseau
C’est le nerf de la guerre. Animer un réseau de contributeurs demande un investissement en termes de temps et de moyens humains. Pour Franck Confino, « il faut vraiment dédier du temps à ça. Je ne dis pas que c’est facile. Quand vous n’avez même pas le temps d’animer un intranet, il va falloir penser à prendre le temps d’animer ce réseau. Mais c’est un gage de réussite et il faut se battre auprès des directions générales pour le faire reconnaître ». Les bénéfices sont en effet nombreux. En plus de la dimension d’échanges, de mutualisation des connaissances et de transversalité – et parce que ce sont les services eux-mêmes qui sont spécialistes de leurs domaines –, le réseau de contributeurs garantit la qualité des contenus. Par ailleurs, ce lieu d’échanges est l’opportunité pour la communication de gagner en légitimité. En expliquant ses contraintes et ses enjeux, la fonction communication peut en effet mieux se faire comprendre. Autant d’enjeux qui méritent de dédier du temps à l’animation d’un réseau de contributeurs.