Les bons mots de la covid
Tout au long de l’année 2020, les collectivités ont dû relayer les consignes sanitaires. Comme dans toute communication comportementale, il a fallu – et il faudra sans doute encore un bon moment – répéter les mêmes messages dans un contexte épidémique anxiogène. Pour maintenir l’attention et apporter un peu de légèreté, plusieurs collectivités et organismes ont tenté de renouveler les messages en misant sur le détournement d’expressions populaires dans des campagnes bigarrées.
C’est dans les vieux adages qu’on fait les meilleures campagnes
Dès le premier confinement, la ville de Fontaine en Isère a utilisé le principe du détournement pour accompagner les habitants dans leurs changements d’habitudes face à la situation sanitaire. L’idée a émergé en interne et en télétravail. « C’est en regardant ma fille qui jouait au soleil sur notre balcon que j’ai fait une association d’idées entre le beau temps un peu anormal pour un mois de mars et les vieux adages français. Les dictons nous appellent à une forme de sagesse populaire. Pourquoi ne pas adapter ces dictons à notre nouvelle réalité ? », explique Julie Millat Carus, chargée de communication de la ville de Fontaine. Ce détournement de dictons a inspiré à Laure Bossan, sa collègue graphiste, celui des images, celles de scènes simples du quotidien pendant le confinement, le tout dans une tonalité positive. Deux premières affiches ont occupé pendant le confinement les panneaux de la ville habituellement utilisés pour annoncer les événements. La campagne s’est poursuivie avec de nouveaux visuels encourageant les gestes barrières lors du déconfinement, puis en septembre, et à l’automne suite à l’augmentation de la contagion. En décembre, la campagne a reçu le Prix de la créa au 32e Grand Prix Cap’Com.
Les bons mots pour ceux qui soignent nos maux
Même principe pour les Hospices civils de Lyon (HCL) à l’approche du deuxième confinement. Fin octobre, 18 messages revisitant des expressions françaises connues de tous s’affichent sur des fonds dégradés acidulés dans les couloirs des hôpitaux lyonnais. Le personnel est d’abord la cible de cette campagne sur les gestes barrières avant d’en être le bénéficiaire. La métropole de Lyon et le Syndicat de transport lyonnais (Sytral), séduits par le ton humoristique des messages, décident de diffuser une partie des visuels dans les stations de métro et de tram, sur les bus et les affichages urbains de toutes les communes de la métropole lyonnaise pour afficher leur soutien au personnel. La campagne est également déployée dans la presse, sur les réseaux sociaux et via des spots radio.
« Déconfinés mais attention à nos aînés ! »
Quelques semaines plus tard, c’est au tour du Service de santé universitaire (SSU) de l’université de Clermont-Ferrand de se laisser tenter par le détournement d’expressions populaires ou plus exactement familières. À l’approche des fêtes de Noël, la direction du service, les deux chargés de prévention et les six étudiants relais cherchent une idée pour sensibiliser de manière différente les étudiants au respect des gestes barrières une fois de retour dans leurs familles. « Cette campagne se substitue à une campagne institutionnelle extra-universitaire descendante basée sur l’injonction à respecter les gestes barrières », explique le professeur Laurent Gerbaud, directeur du SSU. « Nous voulions sortir de la communication répétitive et rébarbative, voire parfois culpabilisante, auprès des jeunes », précise-t-il. En quelques jours, l’équipe affine collectivement le choix des expressions tout en imaginant la manière de les illustrer facilement. La campagne décline à travers six visuels les deux axes privilégiés par le SSU pour communiquer sur la prévention de la covid auprès des étudiants : le port du masque et la distanciation. Elle est diffusée mi-décembre auprès de l’ensemble des étudiants via les canaux digitaux internes de l’université et des différentes structures étudiants, et sur le site et la page Facebook des étudiants relais santé.
Tours Métropole Val-de-Loire territorialise le détournement
Tours Métropole Val-de-Loire a aussi choisi le détournement pour communiquer sur les gestes barrières mais avec pour point de départ le nom des villes de son territoire, avec la volonté d’ancrer la communication sur les gestes barrières sur le territoire. Lancée en septembre 2020, la campagne imaginée par une agence se décline en 22 accroches élaborées autour du nom de chacune des communes et d’une accroche pour la métropole. Des affiches avec ces jeux de mots personnalisés ont été mis à disposition des communes qui le souhaitaient.
Le mot de la fin
Jusqu’au bout de cette année 2020, la situation sanitaire aura inspiré les communicants. Le mot de la fin revient à la RATP, grande habituée des détournements. Une pratique qui a inspiré à la rentrée une campagne fictive à Jouneyd Sidi-Yekhlef. Ce jeune directeur artistique en agence a posté cinq détournements de noms de stations dans des messages de sensibilisation au respect des gestes barrières.
La RATP a pour sa part conclu l’année par un détournement malicieux du nom de la station « Bonne Nouvelle » !