Les mémoires du confinement, les collectivités collectent déjà témoignages et photos
La pandémie de Covid-19 est un événement exceptionnel qui marquera l’histoire. Pour garder la trace du vécu quotidien en cette période, les services d’archives et ceux de la communication des collectivités locales se sont rapidement lancés dans un travail de recueil mémoriel.
« Drôle de période que nous vivons en ces temps de pandémie, n’est-ce pas ? Une période qu’on ne risque pas d’oublier ! Mais les générations futures ? Quelles traces auront-elles de ce confinement mondial ? Et si vous nous aidiez à leur laisser des souvenirs ? » La bibliothèque numérique de Roubaix résume ainsi l’enjeu de la collecte de l’histoire locale du confinement.
Un défi relevé, par exemple, par la ville de Tours, qui conduit le projet d’un livret mémoire autour de la pandémie. Sous l’impulsion de son DGS et portée par la cellule communication interne, l’initiative vise à conserver une mémoire collective autour de cette expérience vécue mais aussi « de faire sens et lien entre tous les acteurs de la collectivité, quelles que soient leurs situations ; réunir ainsi une communauté éclatée autour d’un destin partagé », explique Jean Breillat, responsable de la communication interne de la ville et de la métropole. Ce livret en format paysage, tiré à 1 500 exemplaires, devrait proposer quatre chapitres après un texte introductif, avec priorité à l’image : « La ville confinée » (espaces publics désertés, ambiances…) ; « Les agents sur le terrain » ; « Les agents en télétravail » (témoignages) ; « Les agents en garde d’enfants à la maison » (témoignages) ; et une dernière page d’inédits et de messages de remerciements de la population aux agents. Une publication réalisée en interne et qui devrait être distribuée à la faveur d’un rassemblement convivial fin septembre ou début octobre prochain.
Les archives départementales se mobilisent
Les services des archives de plusieurs départements se sont aussi tout particulièrement mobilisés pour collecter des témoignages, des photos et des documents provenant du public.
« Nous vivons un épisode exceptionnel, qui est déjà l'Histoire. Participez à la collecte #memoiredeconfinement ! » C’est par ce message, diffusé dès le 18 mars sur son compte Twitter, que les archives départementales des Vosges ont lancé un appel aux témoignages. Un appel repris par d’autres départements.
Les archives départementales de l'Aube ont par exemple missionné une association locale pour conduire une campagne de collecte de témoignages audio. Le service départemental du Loiret a aussi lancé un appel aux habitants. « Les documents que nous attendons, issus de l’expérience intime, viendront compléter les archives que nous recueillerons par la collecte auprès des administrations et qui témoigneront de la manière dont les différentes institutions publiques ont géré la crise », précise son responsable du service du fonds historique et généalogique.
Comme Tours, de nombreuses villes conduisent aussi de telles initiatives. Vesoul notamment, qui recueille écrits, photos, vidéos, audio, dessins, peintures, lettres… autour de plusieurs thèmes : inquiétudes, espoirs, occupations, garde des enfants, organisation matérielle du confinement, adaptation de l'activité professionnelle, nouvelles solidarités et initiatives citoyennes... Lille aussi recueille tous les documents qui peuvent rendre compte de l'évolution des habitudes de vie, des émotions, des occupations et des activités des habitants.
Le portail national des archives, France Archives, recense déjà des initiatives similaires dans les départements de la Creuse, du Gard, de la Mayenne, de la Meurthe-et-Moselle, du Pas-de-Calais, de la Seine-Maritime, des Yvelines, de la Haute-Vienne, de l'Yonne, du Val-de-Marne… et dans de nombreuses villes comme Aubervilliers, Avignon, Eaubonne, Grenoble, Lorient, Marseille, Orange, Roubaix, Saint-Étienne, Tourcoing…
À noter que cet engouement pour l’histoire locale du confinement n’est pas propre à la France. Il a été lancé dans de nombreux pays. Chez nos voisins belges, une page Facebook intitulée Covid-19 Archives lui est même consacrée. Elle s'inscrit dans un projet de l'Association des archivistes francophones de Belgique.
Chaque contributeur peut faire don d'archives à l’issue du confinement
Bien que fermés au public en cette période de confinement, les services des archives des collectivités peuvent collecter sous la forme de fichiers numériques mais aussi de vidéos, récits, photographies, dessins, tous les témoignages produits par les habitants. Chaque contributeur peut faire don, à l’issue du confinement, du fonds d'archives qu'il constitue. Ces documents, sources d’histoire vivante et donc sources précieuses, peuvent être envoyés par mail aux archives, qui consacrent cette remise par un formulaire de don ou dépôt, sans condition, incluant la communication immédiate, ainsi que par un formulaire de cession des droits patrimoniaux. À l’issue du confinement, ce fonds peut être complété par des supports papier et photographiques.
Les appels à constituer cette histoire locale, les services communication – internes et externes – des collectivités les relayent et mènent des initiatives pour mobiliser les habitants. La matière recueillie va aussi servir à fédérer dans le « monde d’après » autour « d’une fierté retrouvée d’avoir surmonté l’épreuve ensemble », explique Jean Breillat.