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Les nouveaux horizons de la presse territoriale

Publié le : 28 mai 2024 à 07:31
Dernière mise à jour : 30 mai 2024 à 15:55
Par Coraline Fayolle

La presse territoriale évolue plus vite qu'on ne l'imagine. Année après année, elle se renouvelle, s’adapte aux nouveaux usages d’information, aux nouvelles pratiques démocratiques, et aux aspirations citoyennes. Ligne et déclinaisons éditoriales, iconographie, distribution… Voici les tendances révélées par le panel des candidats au Prix de la presse et de l'information territoriales 2024.

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Des codes empruntés à la presse quotidienne

Didier Rigaud-Dubaa affirmait l'année dernière que « la nécessité de réduire les coûts [suite à la flambée du prix du papier] n’a pas que des conséquences négatives, elle oblige à repenser sa publication, à définir une nouvelle ligne éditoriale prenant en compte les évolutions récentes des usages médiatiques... »

Et ces évolutions contraintes portent leurs fruits. Un changement de paradigme, de la communication à l'information, se fait ressentir cette année dans plus d'une dizaine de candidatures. Nous assistons à une apparition de publications d’informations de territoire, reprenant les caractéristiques du journal : papier affiné, grand format pliable, mise en page retravaillée, ligne éditoriale moins « autocentrée »... Ce sont principalement de grandes collectivités, départements et régions, qui présentent cet angle résolument journalistique, traitant de sujets que l’on pourrait retrouver dans la presse quotidienne traditionnelle : reportages sur des lieux, portraits d'habitants, recettes, dossiers informatifs sur des sujets nationaux ou internationaux.

Cette dépolitisation des contenus, également caractérisée par une plus faible présence des élus au fil des pages, est marquée par la volonté de mettre en avant les habitants, leurs actions. Une région candidate énonce souhaiter « marquer la rupture du magazine institutionnel pour un magazine de territoire centré sur l'usager ». La facilitation du lien et du dialogue est donc désormais au cœur des réflexions, l'inclusion et l'authenticité se veulent fédératrices.

À noter toutefois que ce virage journalistique ne semble cependant pour l'instant pas (ou peu) emprunté par les collectivités de plus petite envergure.

L'émergence du journalisme de solutions

À travers ces lignes nouvelles, le journalisme de solutions se fraie peu à peu un chemin. Un département candidat nous confie aborder ses dossiers « sous un angle de journalisme de solutions, avec des exemples concrets et des contacts » afin de valoriser les actions de la collectivité, mais aussi la dynamique du territoire. Cette tendance aux solutions fait un écho tout particulier, Christophe Agnus, notre président de jury, étant vice-président de Reporters d'espoirs. Le journalisme de solutions s’emploie en effet à « analyser et à diffuser la connaissance d’initiatives qui apportent des réponses concrètes, reproductibles, à des problèmes de société, économiques, sociaux, écologiques », explique l'association.

La photographie, miroir de territoire

L'iconographie occupe cette année encore une place toute particulière. Pour les candidats de cette catégorie, comme pour toutes les catégories, les collectivités font un choix iconographique fort, principalement axé sur la photographie.
En contraste au parti pris relevé l'année dernière, fort en illustrations, dans un style plus graphique, ces nouvelles fenêtres sur les territoires traduisent une quête d'authenticité et de réalité. À travers la photo, les collectivités préservent et renforcent la proximité qui les lie aux habitants : portraits, portfolio, renvois vers des albums photos enrichis en ligne. Les banques d'images sont délaissées au profit de réalisations en interne, mettant donc une fois encore le territoire sous les feux des projecteurs.

Graphisme et singularité ne sont pourtant pas en reste

Des infographies pédagogiques, une collectivité qui crée sa propre police d'écriture, une autre qui décline au fil de ses pages des pictogrammes personnalisés, une autre encore qui propose une rubrique en BD : le geste graphique n'est pas en reste. À l'instar de l'année 2023, ce cru 2024 se veut percutant, coloré et attractif. La presse territoriale a encore son mot à dire, et nombreuses sont les collectivités à ancrer le dynamisme de leurs publications dans leur identité, adoptant parfois les codes de leurs cibles les plus jeunes.

Un écosystème florissant

Nous évoquions à l'instant les jeunes, cible parfois difficile (mais pas impossible) à toucher pour les collectivités territoriales. Cette année encore, les parutions territoriales se veulent entremêlées avec d'autres supports, notamment numériques, montrant les ressources et le renouvellement dont font preuve les communicants publics. De nombreux contenus enrichis, accessibles via des QR codes, sont proposés. Podcasts, articles supplémentaires, interviews, vidéos, magazines digitaux, et la liste n'est pas exhaustive. Le Falc – facile à lire et à comprendre – se répand, tout comme les traductions en langues locales (en Bretagne notamment).

Car finalement, c'est aussi ça le service public : un contenu conçu pour tous, accessible par tous.

Une diffusion qui se redessine doucement

Les 80 candidats partagent des données de diffusion intéressantes à analyser. S’ils n’ont pas vocation à être un « échantillon représentatif », ils ont néanmoins l’avantage d’avoir actualisé très récemment leur dispositif éditorial.

On constate d’abord que les tirages de la presse territoriale restent massifs et visent à atteindre une large part de la population. Ils « couvrent » en moyenne 47 % du nombre d’habitants, avec des situations pouvant aller jusqu’à 80 % dans le cas particulier de villes côtières ou touristiques. En considérant le chiffre Insee de 2,17 personnes par foyer en France, les tirages de la presse territoriale s’approchent donc du nombre d’habitants. C’est autant le cas dans les départements ou régions – majoritairement à plus de 300 000 habitants et donc des tirages à bien plus que 150 000 exemplaires ! – que dans des petites communes. Sans surprise, cette couverture chute lorsque les collectivités adoptent une stratégie plus hybride, voire l’abandon du modèle « toutes boîtes ».

Quatre collectivités sur les 80 candidats ont abandonné le toutes boîtes et développé des stratégies alternatives de dépôt dans des points stratégiques et d’abonnement numérique : « Initialement “toutes boîtes”, la diffusion a été rationalisée pour des raisons budgétaires et environnementales à l’occasion de la refonte du magazine en 2023. Elle se fait désormais au sein des équipements communautaires et auprès des partenaires. Une prochaine étape consistera à s’implanter dans les commerces de proximité », confie une agglomération en zone urbaine. Un département candidat propose un véritable web magazine disponible sur le site internet et également par notification sous abonnement.

Des voies de diffusion hybrides

Deux tiers des collectivités candidates conservent une diffusion quasi exclusive « toutes boîtes ». Elle est confiée soit à des prestataires externes – nationaux comme Mediaposte ou locaux –, soit aux bonnes volontés ou agents internes : les élus de la majorité en territoire rural ou des agents missionnés. En général, cette diffusion est complétée d’une distribution volontaire sur les lieux publics du territoire.

Pour le tiers qui opte pour des solutions hybrides et multiples, on note des démarches :

  • de street marketing ;
  • de dépôts auprès d’entreprises et commerçants ;
  • de distribution dans les stations de transport en commun et lieux culturels et touristiques, ou plus ciblés comme dans les collèges et lycées.

Ces dispositifs de distribution sont complétés de distribution postale adressée sur abonnement et auprès de partenaires identifiés.

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