Les régions et les réseaux sociaux : allier ubiquité et proximité
Comment les régions investissent-elles les réseaux sociaux ? Quels réseaux plébiscitent-elles ? Comment mettent-elles cela en œuvre ? Les résultats de l’étude 2018 « Web et médias sociaux : où en sont les collectivités locales ? » nous révèlent les grandes tendances de la présence digitale des régions. Des chiffres complétés par un échange avec Olivier Claudel, responsable pôle Web et réseaux sociaux de la région Grand Est, sur l'organisation de la communication numérique de sa collectivité, et par le regard de Franck Confino sur la présence de l'échelon régional sur les médias sociaux et ses enjeux.
Un regard par strate de collectivité
Régions, départements, métropoles, intercommunalités, grandes villes, villes moyennes, petites villes : comment les différents types de collectivités investissent-ils les réseaux sociaux ? Pour analyser la présence digitale de chaque strate de collectivité, nous nous sommes appuyés sur les résultats de l'étude 2018 de l'Observatoire socialmedia des territoires « Web et médias sociaux : où en sont les collectivités locales ? ». Dans chaque type de collectivité, un communicant numérique a également accepté de répondre à quelques questions pour mieux appréhender les stratégies, les moyens et les méthodes. Des échanges complétés par le regard d'expert de Franck Confino pour apprendre à renforcer sa présence digitale. Commençons ce tour d'horizon social média des territoires avec les régions.
Un déploiement multiréseau des régions fortement marqué
Les 13 régions de métropole disposent d’un site web et sont toutes présentes sur les réseaux sociaux. Sans surprise, 100 % d’entre elles ont un compte sur le réseau majoritaire dans les collectivités (et ailleurs) : Facebook.
Elles plébiscitent les autres réseaux sociaux dans le même ordre que l'ensemble des collectivités, mais dans des proportions bien plus importantes : Twitter (94 % des régions présentes contre 38 % des collectivités en général), puis YouTube (78 % contre 21%), Instagram (61 % contre 18 %), LinkedIn (37 % contre 8 %) et Snapchat (28 % contre 1 %).
Cette présence forte s’explique en partie par un déploiement multiréseau très marqué pour l’échelon régional : 55 % des régions sont déployées sur quatre, cinq ou six médias sociaux. Une montée en puissance qui s’est accélérée après la vague de regroupements qui a abouti à la création de nouvelles régions au 1er janvier 2016.
Quelques questions à Olivier Claudel, responsable du pôle Web et réseaux sociaux de la région Grand Est
À l’occasion de la remise d’un Hashtag d’or à la région Grand Est en décembre dernier, Olivier Claudel, responsable du pôle Web et réseaux sociaux de la région Grand Est, avait donné quelques précisions sur la stratégie social média de sa collectivité. « En tant que jeune collectivité, nous devons faire connaître nos compétences à nos administrés et en quoi la région Grand Est les accompagne au plus près dans leur quotidien. Nous valorisons nos actions et celles de nos partenaires en tenant compte des priorités fixées par l'exécutif : emploi, numérique, territoires, Europe, jeunesse, mobilité. » Nous lui avons posé quelques questions complémentaires pour en savoir plus sur l'organisation de la communication numérique de sa région.
Sur quels réseaux sociaux votre région est-elle déployée ?
Olivier Claudel : Nous sommes présents sur Twitter, Facebook, Instagram, LinkedIn et YouTube.
Quelles sont les fonctions des personnes qui travaillent sur les réseaux sociaux dans votre collectivité ?
O. C. : Les missions des community managers vont de l’animation des réseaux (création de contenus texte/photo/vidéo en lien avec les autres services de la direction de la communication) à la modération des contenus, mais également au reporting des différentes actions ainsi que de la pertinence de campagnes sponsorisées. L’équipe travaille également sur le site internet de la région pour compléter les communications sur nos réseaux sociaux.
Comment êtes-vous organisés en interne pour assurer cette présence digitale (définition de la stratégie, conception des contenus, diffusion, animation, suivi, etc.) ?
O. C. : La ligne éditoriale de chaque réseau social est définie selon les profils cibles que l’on s’est fixés (grand public pour Facebook, leaders d’opinion sur Twitter, monde pro et éco sur LinkedIn et jeunes sur Instagram). Chaque début de semaine, nous parcourons les différents événements ou actions que la région organise et nous répartissons nos publications sur chaque réseau social en fonction du public cible. En fonction des ressources disponibles au sein de la direction de la communication (textes, photos, vidéos), nous créons des contenus spécifiques aux usages des réseaux sociaux. Si l’événement revêt une importance particulière, un de nos community managers se rend sur place pour diffuser du contenu en direct. Les community managers sont à même de diffuser sur tous les réseaux sociaux mais ils sont uniquement en charge de la modération des réseaux sociaux qui leur sont alloués.
Pouvez-vous citer une opération qui a bien fonctionné et nous dire pourquoi selon vous ?
O. C. : Le lancement du Mois de l’Europe sur Instagram : nous avons procédé à des témoignages de jeunes partis étudier à l'étranger via les stories et elles ont été vues plus de 800 fois (ce qui est un assez bon score compte tenu de nos 8 500 abonnés).
À l'inverse, pouvez-vous citer une opération qui n'a pas bien fonctionné et nous dire pourquoi selon vous ?
O. C. : Mais tout fonctionne ! Il y a évidemment des événements qui sont moins relayés, tout dépend de la thématique, qui ne trouve pas forcément son public, ou d'un mauvais timing au regard de l'actualité nationale.
L’accélération après un ralentissement post-fusion
« La plupart des nouvelles grandes régions issues de fusions ont d'abord souffert d'une période de déshérence après 2016, explique Franck Confino. Les médias sociaux n'étaient clairement pas la priorité, en phase de réorganisation interne. La logique aurait également voulu que les pages Facebook fusionnent elles aussi, au sens technique du terme : ce ne fut pas toujours le cas, notamment lorsqu'elles n'étaient pas du même bord. Des pages des anciennes régions ont parfois été supprimées pour des raisons plus politiques que stratégiques. »
Près d’une région sur trois sur Snapchat
L’évolution du pourcentage de régions présentes sur Instagram est un marqueur fort de cette accélération de la présence digitale des régions. De 0 % en 2015, il est passé à 61 % en 2018. Elles sont également près d’une sur trois à s’être déployées sur Snapchat. Un choix cohérent pour cet échelon qui gère les lycées et qui en fait le type de collectivité le plus présent sur ce réseau social des jeunes.
Des territoires mastodontes qui doivent allier ubiquité et proximité
« Aujourd'hui, ces territoires mastodontes ont repris la main, avec des écosystèmes à la fois complets et innovants, analyse Franck Confino. La difficulté pour les équipes en charge des médias sociaux est de faire preuve à la fois d'ubiquité et de proximité, en couvrant des territoires aussi vastes. Pour arriver à cet objectif, l'un des moyens est d'utiliser sur Facebook la fonction de ciblage géographique, encore peu connue des community managers d'institutions publiques. La région Occitanie l'utilise régulièrement : selon qu'il habite Toulouse, Montpellier, Nîmes ou encore Montauban, un abonné ne verra pas forcément les mêmes contenus sur la page : pour favoriser une information de proximité, sur ce qui se passe près de chez soi. »
Développer le conversationnel
Selon le consultant, il reste une marge de progression importante sur beaucoup de pages : l'absence de conversationnel, donc d'humanisation de l'administration. « Les médias sociaux sont d'abord des outils de conversation avant d'être des outils de publication. Lorsqu'un internaute pose une question dans les commentaires et que celle-ci reste sans réponse, on est en droit de se demander s'il y a un pilote dans l'avion... En 2001, Loïc Le Meur écrivait que "les blogs servent à démarrer des conversations". Il en va de même en 2019 pour les médias sociaux : si l'on refuse ce paradigme, autant les fermer et ne garder qu'un bon vieux site internet ! »