L’intelligence artificielle peut-elle réveiller le rédacteur supersonique qui sommeille en nous ?
Un curseur qui clignote sur une page désespérément blanche. 10 jours pour écrire 10 lignes. À ce rythme je ne risque pas de me transformer en petit hérisson bleu. À ce rythme, je ne risque surtout pas de le terminer, cet article. Je crois que j’ai besoin d’un peu d’aide. Mais d’où peut-elle venir ?
Par Mary Mackay, chargée de communication de Pays de Montbéliard Agglomération.
« L'innovation disruptive ou la valeur normative de la communication publique en période de crise des territoires
Comment pouvons-nous perturber la valeur normative de la communication publique en période de crise territoriale ? La réponse est simple : en étant transparents sur notre processus. Lorsque l'on parle d'innovation disruptive, on pense généralement à une innovation qui change fondamentalement le secteur. Mais que se passe-t-il si ce n'est pas le cas ? Et s'il s'agissait simplement d'un changement dans notre façon de communiquer ? C'est ce dont nous allons parler aujourd'hui : comment utiliser l'innovation perturbatrice en matière de communication comme un outil pour construire notre communauté et renforcer notre territoire. C’est un concept important dans le domaine de la communication publique car il désigne les innovations qui brisent les structures de marché existantes, créant des moyens nouveaux et inattendus pour les collectivités d'atteindre leurs cibles. […] »
Pas mal, ce texte, non ?
« Mais qu’est-ce qu’elle nous raconte ? Où veut-elle en venir avec ces propos alambiqués ? Pas prétentieuse, la fille… » Bon allez, stop ! Je dois vous avouer un truc, non sans une pointe de soulagement. Ce n’est pas moi qui ai écrit ce texte. J’ai un peu honte de vous avoir fait croire cela (mais pas autant qu’en 4e D quand mon prof de français m’a convoquée à la fin du cours pour un plagiat manifeste). Alors je préfère être honnête avec vous. Je me suis fait aider, et pas qu’un peu. Cinq mots-clés, trois clics, neuf propositions et me voilà prête à publier un article de trois pages sur un sujet (que je ne maîtrise pas, en plus).
Mais pourquoi ai-je fait cela ?
En fait, j’ai assisté dernièrement à un webinaire présentant différents outils de communication, dont un assistant à l’écriture basé sur l’intelligence artificielle (IA). Writesonic de son petit nom, mais il en existe bien d’autres. Ici, le procédé est simple. Après avoir introduit le sujet avec quelques mots-clés bien choisis, le logiciel génère trois propositions d’introduction. De ce choix découleront trois propositions de plan, dont l’un permettra de générer trois propositions de sous-parties, et ainsi de suite jusqu’à la conclusion. Avec cet outil, me voilà propulsée dans un monde du pseudo parfait sans effort, avec un ratio de dingue entre le nombre de mots alignés et le temps passé à écrire. Une sorte de produit de dopage tel l’EPO du créateur de contenu. Grisant ! Bien sûr le risque est de voir produire des textes aussi absurdes qu’improbables (essayez de combiner Forum de Strasbourg, phase de lune croissante et aquaponey, c’est marrant ;-)).
On pourrait se laisser tenter par la facilité que propose la solution dans ce monde qui voue un culte à l’instantanéité, avec un risque de proposer des écrits formatés, prémâchés, voire prédigérés par la machine. Horreur ! Et je me demande, à user ou abuser de ce procédé, où passeront l’envie, l’attente, le processus de créativité, le temps long de la recherche et de la réflexion ? Je vous entends déjà dire : « Mais qu’est-ce qu’elle est naïve. C’est fini le temps de bouger sept fois sa souris sur l’écran avant de cliquer. Finies les relectures interminables de chaque paragraphe rédigé à la recherche du juste mot. Fini de pianoter sept fois ses doigts sur le clavier avant de taper. »
Alors je m’interroge…
Est-il possible de relever le défi d’écrire un texte à la seule force de ses connaissances et de son imagination ? Devrions-nous nous passer d’un coup de pouce offert par les nouvelles technologies ? L’IA peut ici aider à lever le stress du syndrome de la page blanche. Un outil comme peut l’être l’écriture automatique, par exemple. Une assistance à la rédaction, qui ne remplacera jamais l’intelligence humaine et son esprit critique, mais un soutien quand même bienvenu si tant est qu’on en fasse un usage raisonné ou une aide à l’inspiration par exemple, sans excès, pour en limiter les dérives. Les utilisations, pour nous communicants, seront multiples : note de préconisation, stratégie en tout genre, dossier de presse, discours… Voilà pour les textes longs. Mais également punchline ou slogan, article de blog ou de site internet, post sur les réseaux sociaux… Graphistes, vous ne serez pas oubliés, il existe la même chose pour créer des images.
Alors oui, un texte peut en cacher un autre. Mais ici, point d’allégorie ou de code secret à percer. Juste une illusion, qu’il convient de pointer pour s’en libérer ; qu’il convient de repérer pour en faire notre alliée. Quand je lis certaines productions, je me dis que ce procédé est bien connu et utilisé. Est-ce que cela enlève de la valeur à ces écrits ? Probablement pas. Est-ce que ça la nuance ? Un peu quand même. Si maître Yoda avait un conseil à donner à Sonic, ce serait peut-être celui-ci : « De ces textes prérédigés te méfier, il faut. De ce procédé en abuser, éviter tu devras. D’un peu d’assistance, judicieusement placée, tu t’aideras. »