Mayotte fait com de tout bois
Les enjeux de la biodiversité, en outre-mer mais également en métropole, s'accompagnent de défis pédagogiques. La communication publique intervient en amont des projets pour favoriser les collaborations, en aval, pour modifier durablement les comportements, mais aussi pendant l'action, pour la valoriser. À Mayotte, on remplit les trois missions !
Interview de Raïssa Andhum, 3e vice-présidente du conseil départemental de Mayotte, aménagement et développement durable, à l'occasion de la remise du prix du Génie écologique aux Assises nationales de la biodiversité à Massy-Palaiseau début octobre, dans la catégorie « Protection et restauration des sols et de leurs fonctions ».
Ce prix du Génie écologique est le fruit d’une démarche partenariale ancrée dans votre territoire. Comment s’organisent les institutions à Mayotte et comment portent-elles un discours en commun ?
Raïssa Andhum : D’abord, je dois dire à quel point ce prix, qui récompense une expérimentation d’itinéraires techniques de reboisement de terrains érodés (padzas), nous rend fiers, d’abord parce que nous avons grand besoin de montrer une autre image de Mayotte, qui ne peut être réduite à ce qu’on en donne à voir (les violences urbaines, la pauvreté, l’immigration clandestine), même si c’est une réalité. Être récompensé sur un projet partenarial impulsé par le conseil départemental (avec l’Office national des forêts, le Conservatoire botanique national de Mascarin et le laboratoire Inoq) dans le domaine de la biodiversité, c’est souligner que des démarches positives méritent d’être valorisées à Mayotte. La notion de partenariat n’est pas un vain mot : le président Soibahadine Ibrahim Ramadani est très attaché à la qualité des relations entre l’ensemble des acteurs de l’île, au premier rang desquels l’État, ou les collectivités. Nous sommes convaincus qu’il n’y aura de réussite que collective et partagée.
La mise en avant de ce projet au plan national sera-t-elle reprise en communication interne au département de Mayotte ?
Raïssa Andhum : Bien sûr, c’est pour nous une évidence, le service des ressources forestières étant à l’origine du montage du dossier que nous avons ensuite défendu et promu. La communication interne, celle qui s’adresse aux agents (et même aux élus), c’est la base de toute communication en direction de la population. Nos services et nos directions méritent d’être valorisés au quotidien : durant la crise sanitaire, nous avons mis à l’honneur de nombreux agents issus de différents métiers qui étaient mobilisés, parfois dans des fonctions différentes de leurs missions habituelles. Nous avons reçu un excellent accueil des habitants, qui étaient sensibles au fait qu’on valorise individuellement ou collectivement des fonctions, et celles et ceux qui les incarnent.
Quelles seront la pédagogie et la communication engagées autour de ce projet en direction des habitants ?
Raïssa Andhum : Cette pédagogie et cette communication s’inscrivent, selon moi, dans une démarche plus globale autour de la protection de la biodiversité à Mayotte. Le conseil départemental agit au quotidien : réflexion sur une gestion cohérente des ressources en eau et assainissement ; définition d’une politique stratégique en matière de gestion des déchets ; protection du patrimoine naturel terrestre – 5 600 hectares de forêts départementales, gestion des espaces naturels – ou marin, avec la protection des tortues ; programmes de réduction de la consommation d’énergie ; schéma d'entretien et de restauration des rivières de Mayotte ; développement d’actions de sensibilisation en direction du jeune public…
Vous le voyez, même si les images que l’on voit de Mayotte ne le laissent pas (hélas) toujours penser, Mayotte a un véritable défi à relever et nous ne réussirons qu’ensemble, avec les scolaires, avec les adultes, avec les collectivités et avec les associations, qui jouent à Mayotte un rôle essentiel tous les jours.