Misère de la communication
La communication exerçant son emprise sans limites, tout le temps, dans tous les domaines ? La communication omniprésente et omnipotente ? Que nenni ! Certains villages d’Astérix, façon XXIe siècle, résistent à son empire.
Par Alain Doudiès, consultant en communication publique, ancien journaliste, membre du Comité de pilotage de Cap’Com.
Le document est tout ce qu’il y a de plus officiel. Il est signé « Ministère de l’Action et des Comptes publics – Direction générale de l’administration et de la fonction publique », qui se qualifie de « DRH de l’État », plus, en appui, l’ANACT (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail). Donc du solide, du sérieux, qualité 100 % État garantie. C’est le « Guide de la qualité de vie au travail – Outils et méthodes pour conduire une démarche QVT » – collection « Outils de la GRH ». Pas de bla-bla, que du concret : 54 pages denses, bourrées d’éléments méthodologiques et riches de fiches, « fiches méthode », « fiches outil », « fiches exemple », présentation de cas, ressources. Un modèle de rigueur et de clarté, à haute ambition pédagogique.
Un étudiant, à l’issue de la première semaine de sa première année dans une formation médiocre à la communication, demanderait : « Quel est le dispositif de communication proposé ? » Aucun. Dans ces 54 pages, pas une entrée, pas un chapitre dévolu à la communication. En fouinant, on finit par dénicher, en tout et pour tout, deux passages, cités ici intégralement : dans une liste de 36 items concernant la qualité de vie au travail, la mention « usage des outils de communication » ; dans une fiche identifiant les freins, « manque de communication auprès des agents, du public concerné » et « ne pas utiliser les bonnes modalités de communication ».
L’idée que lancer et gérer une démarche aussi complexe, pouvant susciter réticences et blocages, nécessite impérativement de l’annoncer, l’expliquer et l’accompagner par une communication solide, afin de susciter compréhension, approbation et contribution ? Absente. L’évidence qu’avec de tels enjeux, la communication n’est pas un accessoire mais une structuration de l’opération ? Ignorée. L’affirmation banale que la communication est un des facteurs de la réussite ? Niée. Misère de la communication…