Trop jeune pour être vieille, trop vieille pour être jeune
Je me demande comment la dernière chronique de Marc Cervennansky, « Senior dans la compublique : stop ou encore ? », m’a inspiré ce billet. J’ai eu 40 ans récemment, et même si je n’ai pas encore digéré le fait qu’on me refuse une Carte Avantage Jeune après 25 ans, il est temps d’accepter que je penche aujourd'hui plus du côté senior de la force.
Par Mary Mackay,
chargée de communication de Pays de Montbéliard Agglomération, membre du Comité de pilotage de Cap'Com.
Ces derniers temps, il me semble qu’on parle beaucoup de l’âge et des générations. À moins que ce ne soit l’un de ces sujets cycliques qui reviennent régulièrement. On entend parler des jeunes qui s’informent entre autres grâce à l’IA, comme le montre le dernier Baromètre de la communication locale, ou de ces jeunes qu'on disait incapables de téléphoner ou d’écrire un mail dans le cadre professionnel et qui seraient aujourd’hui même incapables de faire un simple copié-collé. Et puis, il y a les seniors, qu’on malmène.
Que se passe-t-il exactement dans cet espace intergénérationnel ?
Je me souviens qu’il y a encore peu, j’étais souvent la plus jeune dans les groupes que je fréquentais. On me disait « Profite, ça va vite changer ». Eh bien voilà, je crois que ce jour est arrivé. Je ne suis ni triste ni joyeuse, c’est simplement un fait. On me dit que c’est la plus belle décennie qui s’annonce (ce à quoi je réponds que ça fonctionne aussi à 20 et à 30 ans). Il me reste dix ans pour me sentir concernée par les propos de Marc, mais pour l’instant, je me trouve dans un entre-deux. Trop jeune pour être vieille, trop vieille pour être jeune. Pour mes gamins, je suis une « daronne », pour mes parents, je reste leur « gamine ». Un décalage générationnel qui me fait sourire parce qu’il est cantonné à la sphère privée.
Mais dans le cadre professionnel, comment fait-on ?
Moi, dans cette transition, je prends des apprentis. Parfois, je me sens comme eux, pleine d’idées et d’énergie, je me reconnais dans leur enthousiasme. Mais parfois je sens le décalage, surtout quand je commence mes phrases par « Quand j’étais jeune… » ! C’est un moyen de transmettre, certes : transmettre ses connaissances, son expérience, mais pas uniquement. C’est confronter nos points de vue, tester nos méthodes, et ouvrir un chemin que l’autre parcourra à son rythme. Peut-être aussi une façon de « rester dans le coup » ?
On ne sera pas tous maîtres d’apprentissage, formateurs ou conférenciers, mais nous pouvons tous agir à notre échelle. C'est répondre aux sollicitations des étudiants, par exemple lorsqu'ils ont des enquêtes à faire pour leurs études, ou lorsqu’un jeune nous contacte sur les réseaux pour parler de notre métier. C’est décrocher son téléphone quand un lycéen hésite sur la voie à suivre et veut connaître la réalité de notre quotidien. C’est parler des études qui nous ont menés là, des rencontres marquantes qui, par une parole ou un encouragement, ont fait basculer notre choix de vie professionnelle. Répondre à ses interrogations, lui poser des questions, ouvrir son regard sur des perspectives auxquelles il ne pensait pas, l’encourager… c’est déjà lui donner une place. « Se tourner vers l’avenir sans lui tourner le dos », comme dirait le prof de philo dans cette scène culte du Péril jeune.
Nous sommes fin novembre. Les demandes d’alternance reçues dans les services se font plus rares, remplacées par celles de stages, qui, elles, affluent. Nous avons été à leur place, n’oublions pas qu’un jour, ils seront à la nôtre.
Illustration : photo de Markus Spiske sur Unsplash.