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Un collaborateur souhaite quitter votre service : faut-il le retenir ?

Publié le : 10 juin 2021 à 07:40
Dernière mise à jour : 10 juin 2021 à 12:21
Par Yann-Yves Biffe.

Votre service marche comme sur des roulettes. Chacun est à sa place et donne le meilleur de lui-même. Et puis patatras, un de vos collaborateurs vous annonce son départ ! Vers d’autres horizons, un concurrent voire un autre service de votre organisation. Comment faut-il l’envisager ? Faut-il se rouler par terre, à ses pieds, le retenir par la manche ? D’autres options existent...

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Par Yann-Yves Biffe.

Ça donne à penser que vous allez faire bientôt face au départ d’un collaborateur

En 2019, 46 % des salariés français songeaient à quitter leur entreprise dans les 5 années suivantes selon Courrier Cadres le 24 septembre 2019, qui reprenait l’étude « The Workforce View in Europe 2019 », publiée par ADP.
Selon l’étude de rémunération annuelle Hays 2019 analysée par DigitalRecruiters, c’étaient alors jusqu’à 79 % des salariés qui envisageaient de changer d’emploi dans l’année.
La situation économique dégradée générée par la covid et les nombreuses incertitudes qu’elle entraîne ont-elles refroidi les ardeurs au changement d’entreprise ? Non, et même au contraire car de nombreux salariés ont mis à profit leur(s) confinement(s) pour se décider à donner un nouveau tour à leur carrière.
Ainsi, BFM rapporte que « selon une étude de Hello Work, 1 salarié sur 2 a intensifié ses recherches depuis la crise en raison de l’envie d’un nouveau projet professionnel. Si 23 % des personnes interrogées ont déjà changé d’emploi au cours des 12 derniers mois, elles sont 84 % à être actuellement en recherche d’une nouvelle aventure professionnelle ».

Donc vous pouvez, vous allez être confronté au départ d’un collaborateur.
« Hem, chef, je voudrais vous dire quelque chose. C’est un petit peu délicat. C’est pas contre vous, mais, euh, je vais partir. »

La situation peut être analysée selon plusieurs paramètres qui vont faire évoluer votre réaction.
Ce collaborateur est-il bon et a-t-il un impact positif sur l’ensemble de l’équipe ? Si non, alors mieux vaut l’encourager dans son souhait d’évoluer, sans trop lui dire que vous allez vraiment le regretter et qu’il va beaucoup vous manquer. Ça serait quand même dommage que finalement, face à votre affection soudainement exprimée, il se décide à rester.

Mais ce sont rarement ceux-là qui s’en vont, du moins spontanément.
Alors si ce collaborateur est de qualité et vraiment déterminant dans votre organisation, faut-il essayer de le retenir ?

Ça donne à évaluer la réalité de l’envie de départ

Assurément, il faut repenser à vos échanges lors des derniers mois, à des signaux que vous n’auriez peut-être pas identifiés sur le coup. Surtout, il faut avoir un échange avec lui pour comprendre les raisons de ce départ et surtout, les rapprocher des intérêts de votre organisation d’une part et de votre collègue de l’autre. Mais pourquoi ceux de votre collègue ?
Parce que l’épanouissement de l’un ne peut pas complètement prendre le pas sur celui de l’autre. Un responsable qui ne penserait qu’au bon fonctionnement de sa structure à court terme sans penser à l’évolution de ses agents prendrait le risque de compromettre l’avenir de son organisation.
J’ai entendu un jour « c’est bien de penser à l’intérêt des agents, mais il faut d’abord penser à l’intérêt de l’organisation ! », sous-entendu : mieux vaut laisser un agent à la place où il a fait la preuve de son efficacité. Cela me semble assez rapidement contre-productif. Un agent qui sera maintenu dans des fonctions dont il aura fait le tour ne fera plus le bien de l’organisation. Il est reposant de penser qu’un service est bien équilibré et qu’il s’agit de le maintenir en l’état le plus longtemps possible. Mais c’est illusoire : si le service marche bien, c’est que des agents de qualité y contribuent, et il faut penser à leur évolution pour renouveler leur intérêt au travail et donc la qualité de leur production. Car l’habitude contribue à la qualité de la production, mais elle décline au bout d’un moment. La productivité quant à elle repose sur l’envie, la motivation, et celle-ci est alimentée par le renouvellement.

Recevez donc ce collaborateur sur le départ. Si, au cours de cette discussion, vous constatez que votre collaborateur part parce qu’il regrette, déplore..., alors vous pouvez étudier avec lui quelles pistes peuvent être mises en place pour corriger ces situations insatisfaisantes afin de le faire revenir sur sa décision qui n’en est sans doute pas vraiment une.
C’est parfois une question de rémunération. D’après Dalale Belhout de DigitalRecruiters : « Selon l’étude de rémunération Page Group 2019, 68 % des salariés rechercheraient une augmentation de la rémunération dans un nouvel emploi. » Vous pouvez réévaluer l’apport du collaborateur par rapport à sa rétribution, tout en gardant à l’esprit que cela ne doit pas vous amener à déséquilibrer l’échelle générale des rémunérations, au risque de vous retrouver à gérer plusieurs demandes de départ en cascade.
C’est plus souvent une question de considération (où la question de la rémunération a également une place). Peut-être que, pour des raisons légitimes, ou pas, parce que vous faites face à un surcroît d’activité, ou que vous n’êtes pas porté sur les compliments, votre collaborateur a l’impression de mal faire, de ne pas répondre à ce que vous attendez de lui. Parlez-lui franchement, même si vous avez des reproches à lui faire. Vous n’avez plus rien à perdre après tout, et ça peut lui donner envie de rester !
Cela peut également être une question d’amélioration des process. Votre collaborateur, qui ne se sent pas écouté dans ses propositions ou pas assez en confiance pour les formuler, peut vous apporter de précieuses pistes d’amélioration et être le collaborateur idoine pour les mettre en place.
Cela peut enfin être une question de perte de sens. Le collaborateur ne voit plus où va l’organisation, ses objectifs, ou quelle place il a dans un projet devenu flou.
Vous pouvez lui donner les clés qui lui manquent, dissiper ce brouillard qui n’est peut-être que passager, parce que vous savez que l’organisation va évoluer et clarifier ses finalités et ses façons de faire. À l’inverse, si vous ne pouvez pas lui donner de perspectives, alors peut-être que votre collaborateur vous montre la direction à suivre...

Ça donne à privilégier l’épanouissement de votre collaborateur

Dans d’autres cas, vous vous rendrez assez vite compte que le collaborateur souhaite obtenir autre chose : changer, évoluer, se développer dans ses pratiques et responsabilités, s’épanouir. « 53 % des salariés aimeraient quitter leur emploi pour un poste plus intéressant, ce qui en fait le facteur le plus cité », selon DigitalRecruiters.
Si une opportunité se présente, si les missions actuelles ne sont plus assez motivantes, en s’opposant à ce départ (si vous êtes en capacité de le faire), vous abîmerez possiblement une relation de confiance. Un lien sera cassé et, même si ce collaborateur reste à vos côtés, le bon fonctionnement antérieur va se gripper.
Alors mieux vaut accompagner cette évolution que la regretter. Est-ce qu’une évolution en interne des missions dévolues à votre collaborateur peut être envisagée ?
Vous pouvez échanger avec votre N+1 et/ou les ressources humaines : peut-être que des postes comparables vont se libérer chez vous ? Certes, dans tous les cas vous l’aurez perdu pour votre service, mais s’il est de qualité, s’il a un potentiel d’évolution, alors il est légitime qu’il parte, mais autant qu’il reste dans votre organisation ! C’est tellement difficile, et coûteux, de trouver les meilleurs collaborateurs ! Dans ce cas, vous aurez fait beaucoup d’heureux :

  • l’agent concerné aura trouvé en vous une personne capable de comprendre ses aspirations et de faciliter son épanouissement professionnel… et personnel ;
  • votre collègue qui va accueillir un nouveau collaborateur formé et motivé vous en sera reconnaissant ;
  • votre hiérarchie comprendra votre capacité à privilégier l’intérêt à long terme de l’ensemble de l’entreprise sur le vôtre propre à court terme ;
  • et puis, vous permettrez à un nouveau talent d’intégrer ainsi votre équipe, d’apporter des compétences nouvelles… avant d’évoluer à son tour sur de nouvelles missions ?

Félicitations, vous vous constituez ainsi un réseau solide qui saura être sincère et de bon conseil quand vous chercherez à recruter pour remplacer le talent que vous avez formé !

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