Un dircom nommé Édouard Philippe
Où va la communication gouvernementale ? Réponse dans la circulaire qu’Édouard Philippe a envoyée le 14 octobre à ses ministres. On la croirait signée de beaucoup d’entre vous. Jugez-en.
Par Alain Doudiès, consultant en communication publique, ancien journaliste, membre du Comité de pilotage de Cap’Com.
Le diagnostic ? Il vous en rappellera de nombreux. « L'action (du Gouvernement) est aujourd'hui trop peu lisible pour les citoyens : multiplicité d'émetteurs, manque de coordination entre les différentes initiatives de communication (ministérielle), usage de jargon et de nombreux acronymes dans la communication grand public. »
L’orientation principale ? Le rappel sonne comme un air de déjà-entendu dans nos collectivités : « Par circulaire du 27 mars 2018, j'ai chargé le service d'information du Gouvernement (SIG) de lancer les travaux relatifs à la transformation de la communication digitale du Gouvernement, pour permettre aux citoyens de communiquer avec le Gouvernement de manière toujours plus accessible, claire et adaptée à leurs usages. »
Les objectifs de communication ? Ils martèlent ce que nous apprenons lors du premier trimestre de nos formations :
- « moderniser les techniques de communication du Gouvernement, pour les adapter aux nouveaux usages des Français ;
- placer toutes les actions du Gouvernement sous une même “marque gouvernementale”, garantissant l'homogénéité et la reconnaissance de l'ensemble des initiatives ministérielles ;
- arrêter une stratégie et un calendrier éditorial communs à tous les ministères et centrés sur les attentes des Français. »
La conduite d’une communication qui tire à hue et à dia ? Resserrée, bien sûr : « Ce travail suppose un pilotage renforcé de la communication gouvernementale par le SIG et donc une étroite coopération entre le SIG, les ministères et leurs opérateurs. » Plus loin, pour qui ignorerait que la bride est courte : « Tout projet lié à la communication gouvernementale, qu'il soit ministériel ou interministériel, doit faire l'objet d'un partenariat renforcé entre le SIG, les ministères et les principaux opérateurs. » Pour ceux qui n’auraient toujours pas compris qui dirige la communication, la circulaire enfonce le clou de l’autorité du Premier ministre, via le SIG, chargé de veiller au respect des règles : demande de l’agrément pour toute nouveauté, notamment – figurez-vous – les marchés publics, planification des actions de communication et « calendrier global ». Édouard Philippe, super dircom.
Quant aux missions confiées au SIG, elles ne vous feront pas tomber de votre chaise, entre autres : « Connaître l'état de l'opinion publique, dans les médias comme sur les réseaux sociaux ; bâtir une stratégie de communication adaptée aux publics visés ; réagir aux fausses informations fortement relayées sur Internet ; en cas de crise, mobiliser les outils nécessaires ; assurer la diffusion de l'information au plus près de la population ; veiller à ce qu'une analyse de la performance des actions de communication soit menée au cas par cas ; garantir la cohérence de la “marque” gouvernementale. »
Donc, au premier regard, rien de nouveau dans la République de la communication publique. Mais, bien tranquille dans mon coin, je suis trop sévère. Voyons cette circulaire de plus près. Entre les lignes. Faute de l’avoir rencontré au Havre en 2017, invitons le Premier ministre à notre prochain Forum. Édouard Philippe, guest-star dans l’ancienne ville de son ami Juppé, pas mal pour le rayonnement de Cap’Com !