Les belles histoires de la compublique numérique
Chaque année les Hashtags récompensent les dispositifs innovants de communication sur le web et les réseaux sociaux. Au-delà des mécaniques numériques bien rodées, ils sont surtout le reflet de stratégies de communication globales exemplaires qui favorisent le lien avec les publics et les usagers. Cette année, le palmarès se raconte en histoires à cœur ouvert et révèle des récits incarnés, émouvants ou fédérateurs. Ouvrons ce livre d’histoires avec les lauréats présents au Forum de Toulouse en décembre dernier.
Les actions présentées ici sont lauréates des Hashtags 2023 portés chaque année par l’Observatoire de la #compublique numérique. Leurs auteurs ont présenté leur démarche en conférence hop lors du Forum de Toulouse en décembre 2023. Cet article s’appuie sur leur témoignage.
Illustration de Une : conférence hop au Forum de Toulouse © Sébastien Pouchard / Cap'Com.
Les yeux de Maëlia Chevallier et Tim Blanloeil ont brillé ce 5 décembre 2023 à Toulouse. Étudiants en master de communication publique à Rennes 2, ils étaient présents dans la salle de conférence hop – au milieu des communicants publics participant au Forum de Toulouse : « Tapis rouge et amphithéâtre bondé pour applaudir les auteurs des plus belles campagnes de communication publique numérique : on se croirait à Cannes ! », « L’insolite est le point commun de toutes ces campagnes », nous disent-ils. Et si l’insolite était fait de démarches participatives, de valorisation engagée des services publics et surtout de quelques communicants qui ont osé sortir des sentiers battus, se mettre en scène ou proposer de nouvelles narrations ?
« Vas-y, parle comme si tu étais une influenceuse »
C’est ce qu’a dit Maryne Muller, alors community manager à la Collectivité européenne d’Alsace, à son apprentie, en constatant qu’il fallait que la collectivité change de ton pour émerger sur les réseaux sociaux. Et ça a marché : « Gros boom avec notre reportage dans la déneigeuse à 4 heures du matin en plein épisode neigeux : on recevait des messages privés pour mettre la story à la une ! »
Depuis, le format de journalisme de proximité s’est développé et a trouvé son rythme : le Tour de France en immersion dans la caravane, la pose d’une passerelle, les événements sportifs. Les stories sont diffusées à un rythme hebdomadaire. Trois personnes sont mobilisées, entre les tournages, les montages, les publications et la modération. Et le résultat est là : après le constat que les publications Facebook peinaient à émerger, chaque story rassemble jusqu’à 3 500 vues uniques.
Fédérer des correspondants internes pour une information de proximité
Même constat au département de l’Essonne : « Notre parole manquait de proximité sur les réseaux sociaux ; il fallait accélérer la remontée d’information des services départementaux », explique Julien Bordas, responsable de la communication numérique. La réponse a été la création d’un canal interne d’information, commun entre la direction de la communication et le pôle communication interne. Le réseau de correspondants #Feelcom est né il y a deux ans. Les 50 correspondants – volontaires et soutenus par leurs responsables hiérarchiques – s’engagent à mettre en place la minute com dans leurs réunions de service, à poster des informations internes ou externes sur la plateforme collaborative interne, à répondre à certaines questions spécialisées issues des réseaux sociaux. Et à participer aux meetcom : ils se retrouvent trois demi-journées par an dans des lieux emblématiques du département. L’occasion de fédérer le réseau, de partager des bilans issus des réseaux sociaux, mais aussi de former, à la photo par exemple.
« #Feelcom a permis d’enrichir nos publications sur les réseaux sociaux, le web et en communication interne », poursuit Julien Bordas. « Il nous reste à travailler avec les correspondants pour qu’ils osent poursuivre en commentaires ou partager les publications des autres. »
Au menu des Hashtags 2024
Cette année, les Hashtags porteront sur les belles initiatives des collectivités territoriales sur TikTok et – comme tous les ans – sur les meilleures actions saisies dans la veille de l'Observatoire. Guettez le blog de l'Observatoire pour connaître les dates pour déposer vos actions et benchmarker (juin-juillet 2024).
« Montrer qu’on intervient dans la vie des gens »
C’est un message d’authenticité que porte Anne-Laure Hamonou, cheffe de service information du département d’Ille-et-Vilaine, pour expliquer ce qui l’a menée à créer le podcast « De vive voix, quand la solidarité se raconte en podcast ». Une fois par mois sont traités des sujets liés à l'intime, à des moments forts de la vie des gens, qui ont permis un avant et un après, avec l’appui du département : un habitant qui reprend confiance à vélo, l’accueil offert par des familles solidaires, « Jette ta bouteille à la mer », les aidants, les victimes de violences conjugales, les distributeurs de protections périodiques dans les collèges, le sport adapté, les premières vacances au bord de la mer, être parents ça s’apprend, les bistrots mémoire, etc.
« Une fois que cette ambition est posée, on se doit d’être à la hauteur, par le choix d’une identité graphique et sonore soignée, la présence professionnelle et discrète du journaliste en voix off, un soin très poussé dans la diffusion et la promotion de ces créations vocales », détaille-t-elle.
Faire du beau, susciter l’émotion
Marie Traisnel, directrice de la communication de la ville de Pantin, et Baptiste Maurel, directeur de la communication du département des Pyrénées-Orientales, s’entendent tous deux sur l’esthétisme pour parler au cœur de leurs publics. « Pour convaincre les habitants de Pantin que l’espace public mérite le respect, on a fait entrer les agents de la propreté dans la tradition pantinoise des portraits d’art, qui décline depuis le XIXe siècle le procédé technique du collodion », explique Marie Traisnel. Le résultat, c’est une expo photo très belle présentée dans la rue, tirée en bâche XXL sur la façade du centre administratif, diffusée en print, et évidemment en ligne et sur les réseaux sociaux. Et complétée d’une invitation faite aux habitants à participer à un « Vis ma vie d’agent de la propreté ».
Baptiste Maurel complète : « Au département des Pyrénées-Orientales, nous cherchons une communication émotionnelle forte. Et pour parler de collège, on a raconté la romance entre Sarah et Alexandre. » Toute la production a fait l’objet d’un grand soin esthétique : le casting, la réalisation, la diffusion en cinéma en plus des réseaux sociaux, un making-of et une avant-première avec les acteurs, leurs familles, les agents du département. « On a réussi à éviter l’inventaire des compétences départementales “à la Prévert” et à raconter une belle histoire en restant simples et humbles. »
Maëlia, Tim, les étudiants de Rennes 2, et les communicants dans la salle de Toulouse ont certainement apprécié ces campagnes inspirantes. Ce n'est évidemment que le début de l'histoire : parce qu'une belle réalisation, une narration émouvante, un témoignage sincère, c'est d'abord le fruit d'un travail rigoureux d'écriture, de scénario, de casting, de coordination de la diffusion, de relations aux partenaires : bref, un travail de pro.