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Toqués de TikTok en 2020 ?

Publié le : 14 septembre 2020 à 06:32
Dernière mise à jour : 21 juillet 2021 à 19:03
Par Marc Cervennansky

Vous vous en souvenez ? C’était fin 2018. J’attirais votre attention sur un réseau social qui commençait à prendre de l’ampleur. D’abord dénoncée comme étant un repaire de pédophiles traquant de jeunes ados s’adonnant à des chorégraphies hypersexuées, TikTok, application à mi-chemin entre le karaoké et la Star Academy, s’est fait une place parmi les géants des réseaux sociaux. Majoritairement adoptée par les 13-25 ans, TikTok a été téléchargée plus de 2 milliards de fois dans le monde.

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Par Marc Cervennansky.
@Cervasky

Dans ma première chronique sur le sujet, je dénonçais ce nouveau réseau « qui encourage la superficialité, le narcissisme sans limites. Un réseau qui incite les adolescents et adolescentes à une surexposition de leur personne avec tous les risques que cela peut comporter ».

Pour nous, communicants publics, j'invitais aussi à « la prudence vis-à-vis de ceux qui voient dans TikTok une nouvelle et simple opportunité marketing pour capter les publics qui fuient Facebook. La popularité d’un réseau social justifie-t-elle que l’on doive absolument se l’approprier pour s’adresser à des publics que l’on ne touche pas par ailleurs ? (...) Une application comme TikTok, si son succès se confirme et s’inscrit dans la durée, doit nous interroger sur les valeurs qu’elle véhicule, et nous incite à bien réfléchir avant d’en adopter les codes ».

L’application a connu en mars 2020 son meilleur trimestre depuis sa création, avec 315 millions de téléchargements

Qu’est-ce qui a changé depuis, pour que je remette le sujet sur la table aujourd’hui ? Deux événements majeurs, pour le moins dramatiques, ont boosté et redéfini en partie l’usage de la plateforme.

Premier événement : la crise sanitaire liée au coronavirus et le confinement à domicile d’une grande partie de la population ont été l’occasion pour de nombreuses personnes, et pas seulement les plus jeunes, de découvrir TikTok. L’application a ainsi connu en mars 2020 son meilleur trimestre depuis sa création, avec 315 millions de téléchargements sur les stores d’Apple et Google Play.

Le 20 mars, le hashtag #coronavirus avait généré 15,6 milliards de vidéos vues, #confinement en comptait 76,7 millions et #jerestechezmoi, lancé en partenariat avec le gouvernement français, en générait 9,5 millions.

Cela a donné lieu à quelques créations amusantes telles que des courses dans un magasin vide, comment s’occuper jour après jour sur son canapé ? ou la parodie d’un cours donné à distance par un prof.

Second événement : le mouvement Black lives matter aux États-Unis, qui a généré plus de 21 milliards de mentions sur TikTok. Chacune y dénonçant le racisme et les violences policières contre la population noire. Le réseau social est ainsi devenu malgré lui une plateforme de mobilisation citoyenne et politique qui attire des publics plus âgés. Un comble quand on sait qu’il s’agit d’une application chinoise, peu portée sur les libertés individuelles !

Et en France, qu’en est-il de TikTok ? Nous comptons aujourd’hui 6,5 millions d’utilisateurs actifs. Notre président de la République a un compte avec déjà 765 000 abonnés et seulement deux vidéos publiées, pas vraiment dans le ton du réseau social. Dans un autre registre, Jean-Luc Mélenchon, qui compte 129 700 abonnés, ne fait pas beaucoup mieux dans la maîtrise de TikTok.

Quid de la communication publique ? Eh bien certains se sont lancés, timidement pour l’instant.
Fontenay-sous-Bois compte à ce jour une soixantaine d’abonnés, tout comme l’université de La Rochelle. Le conseil régional Centre-Val-de-Loire, avec une ligne éditoriale axée sur les bons plans, rassemble 70 abonnés. Et la ville de Gruissan, avec une vingtaine de publications à ce jour, dépasse la centaine d’abonnés. Nous sommes donc encore en phase de tâtonnement et d’exploration. Les jeunes ne se sont donc pas encore rués sur les comptes des collectivités.

« S'inspirer de contenus d'utilisateurs plutôt que de sources institutionnelles »

Une utilisation toutefois intéressante de TikTok : celle du journal Le Monde, qui a ouvert son compte en juin 2020 avec 61 500 abonnés et une quarantaine de vidéos publiées. Objectif : toucher une génération qui souvent ne lit pas et ne connaît pas le journal. Lutter également contre les fake news qui pullulent sur les réseaux sociaux.

La recette de la réussite du quotidien ? Des tutos, de la pédagogie tout en restant ludique et léger, des sujets d’actualité. Et surtout « s'inspirer de contenus d'utilisateurs plutôt que de sources institutionnelles », selon Laetitia Béraud, une des trois journalistes dédiés à la production de contenus pour le réseau social.

Cela étant dit, cela signifie-t-il qu’il faille poser un regard nouveau sur TikTok et s’y lancer vaillamment ? Même si son usage initial a évolué avec des perspectives intéressantes pour y traiter des sujets plus sérieux, TikTok utilise des ressorts à peu près identiques aux autres réseaux sociaux. Il s'agit de proposer des fonctionnalités amusantes à utiliser, qui mettent en valeur les utilisateurs. L’affichage du fil de publications géré par un algorithme vise à créer une dépendance pour rester scotché à son écran le plus longtemps possible.

Comme le déclarait Fred Cavazza : « TikTok n'est qu'un véhicule pour toucher ados et préados. (...) Le choix de la plateforme est anecdotique. L'important doit être : est-ce qu'on a des choses intéressantes à raconter et à qui ? »

Il est pertinent de déployer des moyens sur TikTok, non pas pour « toucher les jeunes » mais, si vous avez besoin de faire passer des messages précis aux 13-25 ans, susceptibles de les intéresser. Le plus délicat sera d’employer le ton adéquat. Pour le coup, contrairement à ce que nous affirmons depuis longtemps pour l’usage des réseaux sociaux en collectivité : consultez et associez vos stagiaires de troisième à la gestion du réseau social !

Illustration : montage d'après des photos de Photo-Boards et Ron Karampela pour Unsplash.

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