À la com de Lille, le choix de la proximité et des ressources internes
À Lille, le service communication s’appuie prioritairement sur ses compétences en lien avec celles des autres services municipaux pour déployer des actions de proximité. Pour Cap’Com, le dircom lillois Baptiste Monnot décrypte ce fonctionnement, au plus près des sujets et du terrain, dans ce sixième numéro de l’enquête 2024 consacrée à l’évolution et à l’organisation des services com. [5/6]
Par Edwige Prompt, journaliste, et Marie Cellard, infographiste.
Enquête pilotée par Bertrand Bellanger, directeur adjoint du développement économique, de l'emploi et du tourisme d’Amiens Métropole, et Jeanne Rebuffat, directrice de la communication de la ville de Lyon.
Voir à la fin de cet article toutes les autres analyses des services communication réalisées pour cette étude.
Tableau de bord du service com de Lille
Une organisation qui privilégie les talents internes
« Les chargés de communication sont le cœur du réacteur. Nous sommes organisés par métiers mais les chargés de communication sont thématisés. En lien avec les services qui sont dans leur portefeuille, ils préparent et animent les plans de communication en associant les différents métiers. J’y tiens beaucoup. C’est un vrai sujet pour moi dans le lien que la dircom peut avoir avec la collectivité. Je crois beaucoup aux liens humains qui se tissent entre les gens, qui créent des ponts, qui font que le travail devient simple et fluide parce qu’on se fait confiance, parce qu’on se connaît. On ne se jette pas des mails à la figure. On arrive à un peu de stabilité dans les effectifs, les chargés de com restent un peu plus : du coup, ces liens-là commencent à se créer. Et cela apporte énormément de fluidité, cela améliore grandement les informations qui nous remontent et, du coup, la qualité du travail derrière. »
Aller chercher les idées, c’est la partie la plus intéressante de notre travail. Donc on s’organise pour avoir des temps de réflexion en interne.
« On ne travaille avec aucune agence pour l’élaboration des campagnes et la stratégie. On fait tout en interne. Si on se donne le temps de réfléchir au sujet, on est les mieux placés pour savoir vers quoi on doit aller. Il faut précisément avoir en tête à qui on veut parler et ce que l’on veut dire.
Ce qui doit nous guider, c’est l’efficacité : ce n’est pas “Est-ce que ça en jette ?” mais plutôt “Est-ce que les gens le comprennent ?”. En communication publique, dans 95 % des cas, on a besoin de choses relativement simples. Le reste du temps, on a besoin d’une idée pour créer une campagne impactante. Bien sûr, l’agence peut avoir des concepts de com intéressants. Mais aller chercher les idées, c’est la partie la plus intéressante de notre travail. Donc on s’organise pour avoir des temps de réflexion en interne. Ce serait quand même dommage que le service se coltine les plaquettes de rentrée scolaire, et que, pour une campagne sur la braderie, on aille chercher une agence. On a de vrais talents à la com et cela fonctionne bien comme ça.
Nous disposons tout de même d’une enveloppe pour faire travailler des graphistes freelances. Au départ, on espérait “recruter” 3-4 graphistes avec qui on travaillerait régulièrement. Mais il s’avère que l’on a du mal à fidéliser des freelances. Un indépendant, évidemment, ne peut pas avoir la même réactivité que nous. Je pense aussi qu’on a tendance à leur donner les choses les plus basiques. On a échoué peut-être aussi parce qu’on est toujours pris par le quotidien. On n'a pas pris le temps de recevoir les gens, de leur expliquer ce qu’on cherche et comment on travaille. »
L’accent sur la com de proximité
« Quand je suis arrivé en 2021, il n’y a pas eu de révolution au niveau des pratiques et de l’organisation. Mais j’ai souhaité faire évoluer les choses sur la communication de proximité, c’est-à-dire les projets dans les quartiers, les travaux, qu’on ait des panneaux, des infos riverains. J’y tiens beaucoup, parce que ça me semble faire partie du service public de la communication, que les gens soient au courant des aménagements dans le square d’à côté et des pistes cyclables qui sont faites devant chez eux. »
L’intégration récente de la communication interne
« Il y a un an nous avons récupéré la communication interne. Il y avait le souhait de renforcer le lien entre communication interne et communication externe. Beaucoup de campagnes s’adressent aussi aux 4 500 agents de la ville. On voulait également améliorer la connaissance que nos collègues ont des politiques et projets portés par la ville pour en faire des médiateurs plus efficaces. Ils sont les premiers ambassadeurs des politiques municipales. »
Un travail en complémentarité avec les services
« Il y a une dizaine de chargés de communication ou référents com dans les services municipaux. J’y suis assez favorable si on partage des méthodes de travail qui permettent de cadrer les choses. Leur présence améliore grandement notre connaissance de la vie du service et de l’évolution des projets. Cela donne énormément de souplesse et permet de sortir les bons documents au bon moment pour les bonnes personnes.
Dans ces services, au zoo par exemple, ils sont au plus près de la “matière première”, de l’activité du site au quotidien. Ils ont des idées que l’on n’aurait pas dans nos bureaux. À la com, on a toujours un regard à la fin pour valider les documents qu’ils produisent à partir de gabarits qu’on a réalisés.
Pour les newsletters, c’est le même principe. On travaille, nous, la charte graphique, on forme les équipes, on les relit toutes. Je pense vraiment que l’avenir de la communication publique, c’est le lien direct avec les gens. Et les newsletters sont des outils qui nous permettent d’avoir ce lien direct.
Pour les réseaux sociaux, c’est plutôt complémentaire d’animer des communautés avec des informations plus précises, techniques et régulières sur des sujets comme le patrimoine ou la nature… Il faut juste qu’il y ait une charte éditoriale, que les gens qui s’en occupent soient formés et qu’ils n’oublient pas de passer aussi par les outils de la ville quand il s’agit d’élargir le public. »
Des liens renforcés avec les mairies de quartier
« Nous nous appuyons beaucoup sur nos dix mairies de quartier pour une com de proximité. Chacune a son minisite web et sa newsletter. Nous avons beaucoup renforcé le lien entre la direction de la communication et les communicants dans les mairies de quartier. Un responsable de proximité est vraiment en lien direct avec eux et on les accompagne pour les faire monter en compétence. Les agents qui sont sur le terrain, dans leur mairie de quartier, ce sont eux qui sentent les sujets. »
Monday comme unique outil de gestion de projets
« Depuis 2021, nous travaillons intégralement avec le logiciel de suivi de projets Monday. Quand ils ont un besoin de communication, les services remplissent un formulaire qui génère un brief sur Monday. Je reçois ces briefs et je les valide. Si le brief est accepté, je l’oriente vers les chargés de communication et on tague les métiers à associer. Ensuite toute l’évolution du projet se fait dans Monday jusqu’à sa livraison et sa clôture. L’outil nous permet d’échanger des fichiers et génère des notifications par mail.
Nous avons paramétré et configuré le logiciel payant selon nos besoins. C’est assez confortable, cela permet d’avoir une visibilité sur tout ce qui rentre et d’associer facilement l’ensemble des métiers. Vu le volume qu’on a à traiter, c’est un outil précieux et rassurant. Pour que ce soit efficace, il faut y consacrer du temps mais la contrainte se justifie. »
Un recours à l'IA pour préparer les projets graphiques
« Nous utilisons l’intelligence artificielle (IA) sur la création graphique. Cela nous permet de faire les premières mises en place avant un shooting quand on veut présenter le projet aux élus et au photographe. C’est assez confortable et ludique dans la préparation des campagnes. On gagne beaucoup dans la traduction immédiate d’une idée. Pour l’écriture, je ne perçois pas la plus-value, du moins dans la com publique où on essaie d’humaniser les choses. En fait, je ne vois pas de vrais gains de productivité. Pour m’amuser, j’ai déjà essayé de tester l’IA sur des plans de com : je n’ai pas été convaincu par les résultats, peut-être parce qu’il faut passer du temps pour rendre la machine efficace. On va se pencher sur la question : je vais faire du benchmark sur des outils plus performants que le module de la suite Adobe qu’on utilise déjà. Comme on fait beaucoup d’infos riverains sur les projets urbains, avec des pictos et une sémantique identiques, il existe peut-être des solutions pour générer la V1 de panneaux ou de flyers. »
Photo principale (de gauche à droite) :
Enquête 2024 sur les services communication
Où en sont les services communication aujourd’hui dans leur positionnement vis-à-vis des élus et des services ? Comment assurent-ils en 2024 leurs missions à la charnière entre le politique et l’administratif ? Quels sont les fonctionnements, les règles de validation, les outils mis en place dans le service et avec les autres services ? Quel impact l'IA a-t-elle sur leur service ?
En amont d'un Grand angle sur la place et l'organisation des services com animé par Bertrand Bellanger, directeur adjoint du développement économique, de l'emploi et du tourisme d’Amiens Métropole, et Jeanne Rebuffat, directrice de la communication de la ville de Lyon, au Forum Cap'Com de Lille le 11 décembre 2024, Point commun a mené l'enquête auprès de plusieurs directeurs et directrices de la communication de collectivités de tailles variées.
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